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Début janvier 2025, une impressionnante cavité est apparue à Villerupt (Meurthe-et-Moselle), à deux pas d'une maison. Neuf mois plus tard, une société débute de nouveaux forages pour s'assurer que cet effondrement n'en cache pas d'autres...
Le gigantesque trou est toujours là, rue François Raspail à Villerupt. Il est apparu le 2 janvier dernier, à cheval entre le trottoir et l'allée d'une maison. Ce jour-là, un habitant a eu chaud : la veille, sa voiture était encore garée à l'endroit où le trou est subitement apparu le lendemain !
D'une profondeur initial estimée à 2,5 mètres, le trou a ensuite gagné en largeur et en profondeur, avant de se stabiliser. Au fond du trou, on trouve désormais différents débris (ancien garde-corps, des blocs de béton, les canalisations...), et même de la pelouse qui a commencé à pousser. Les deux maisons les plus proches, la numéro 18 et la numéro 16, sont toujours inhabitables.
Ce lundi 22 septembre, une entreprise spécialisée dans l'étude géotechnique des sols s'est rendue sur place pour débuter des forages. "On avait déjà réalisé un premier diagnostic de la cavité en début d'année, on est de retour pour faire des forages. Pendant deux à trois semaines, on va forer tout autour de la maison, mais aussi en dessous, pour repérer d'éventuelles autres cavités. On va forer à 25, 30 mètres maximum" nous explique un responsable.
Les opérations permettront de sonder les environs pour s'assurer que d'autres cavités ne se cachent pas aux alentours. Une chose est sûre, "vous voyez le volume du trou qui a disparu, c'est énorme : donc toute cette terre a bien dû partir quelque part".
À l'issue des études, "on saura si la faille s'étend ou pas" explique le maire de Villerupt
Nous avons contacté Pierrick Spizak, le maire de Villerupt, qui rappelle qu'"on avait déjà fait réaliser des sondages au printemps dernier, mais certains résultats étaient incertains, donc on a dû refinancer une étude." À la charge de la commune. "Comme le site a été reconnu en état de catastrophe naturel, les dégâts et les travaux de réparation seront pris en charge par les assurances; en revanche les études sont à la charge de la commune". Ce qui représente jusqu'ici une facture de près de 80.000€, précise-t-il.
Le but de ces études est bien de "localiser s'il y a d'autres risques aux alentours. Une fois qu'on aura les conclusions, on saura si la faille s'étend ou pas, si les logements sont encore habitables, si on peut commencer à combler la cavité. On espère donc qu'on nous dira quelles mesures prendre pour reboucher le trou."
Face à l'inquiétude et l'impatience -légitime- des riverains, il explique que "Ce n'est pas qu'on veut pas informer, mais tant que les études sont en cours, on ne peut pas tirer de conclusion. Notre priorité, c'est la sécurité des riverains, et de pouvoir reloger les personnes qui habitaient là".
La piste d'un effondrement karstique, une menace très répandue en France
En février, nous avions obtenu le rapport publié par le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM).
La conclusion du rapport était que "de nombreuses incertitudes subsistent sur la cavité, en particulier concernant son extension et sa géométrie, mais aussi sur le processus qui en est à l’origine."
L’hypothèse principale avancée était que "le secteur est situé sur un plateau calcaire (calcaires du Bajocien), pouvant localement comporter des cavités karstiques. Au vu du volume de terrains argileux effondrés et de l’emprise de la zone affaissée à proximité de l’effondrement, une cavité d’origine karstique s’étendant en partie sous la propriété des n°16 et 18 et sous la chaussée de la rue F. Raspail pourrait être à l’origine des désordres."
Mais d'autres pistes étaient aussi envisagées, comme "une «vidange» rapide d’une cavité comblée d’argiles suite à un phénomène pluvieux exceptionnel", "un lessivage progressif et continu des argiles en profondeur, dû à des circulations d’eaux souterraines, créant un vide remontant vers la surface jusqu’à la rupture brutale de cette dernière", ou encore "la rupture du toit d’une cavité située dans le calcaire et entrainant à sa suite l’ensemble des terrains la recouvrant, limons compris."

Répartition des territoires karstiques en France métropolitaine / © IGN
La menace d'effondrement liées à des cavités karstiques est loin d'être anecdotique en France. "Des affaissements et des effondrements liés au karst peuvent se produire sur près de 40 % du territoire français et menacer la sécurité des biens et des personnes vivant au droit ou à proximité de ces cavités"prévient ainsi un expert du Cerema, un centre d'étude public français.
L'effondrement karstique est le résultat d'une karstification, l'action de l'eau qui dissout le calcaire, et de la suffosion, qui emporte les matériaux fins du sous-sol. Ce lent processus de dissolution des roches par l'eau crée des cavités, appelées dolines ou gouffres, qui finissent par atteindre le sol, menaçant les infrastructures et habitations.
Rappelons que ce type d'effondrement n'est pas le premier qui est survenu à Villerupt : "En 2020, il y avait déjà eu un effondrement rue Emile Zola. Et il y en avait eu début des années 2010, près de la résidence Robespierre" se souvient le maire. Et dans ce même secteur, " dans les années 70, une maison s'était carrément effondrée".