Marché de l'occasionVoitures électriques: attention à la décote

Christophe Wantz
La dépréciation des véhicules électriques serait beaucoup plus importante que celle des modèles thermiques. Pourtant, avec les progrès des dernières génération de batteries, les professionnels s'accordent à dire que cette baisse n'est pas rationnelle. Explications.
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Il y a quelques années, ce qui freinait l’achat d’une voiture électrique, c’était les doutes sur l’autonomie des batteries.
Car rouler en électrique coûte moins cher qu’en thermique, c’est désormais prouvé. Une étude démontre qu’en rechargeant son véhicule électrique majoritairement chez soi et en utilisant à bon escient les bornes publiques, rouler en électrique pourrait revenir trois fois moins cher que faire le plein d’une voiture thermique, selon le profil des conducteurs. Le budget carburant annuel d’un conducteur typique d’une voiture électrique (avec 85% de recharge à domicile) peut en effet être divisé par trois par rapport à un automobiliste au volant d’un véhicule thermique. En moyenne, il faut compter 539,50 euros par an pour la recharge de sa voiture électrique (dont environ 150 euros de recharge publique) contre un budget carburant de 1.526 euros pour un diesel ou 1.635 euros pour un véhicule à essence.

Seulement voilà: l’acquisition pose un problème de trésorerie: même avec les aides, il faut sortir de sa poche entre 15.000 et 100.000 euros pour une voiture neuve et une borne de recharge selon les modèles.

Aucun salut n’est à attendre des sociétés de location avec option d’achat, ou leasing, qui “en France facturent 56% de plus pour la location d’un véhicule électrique à batterie par rapport à un équivalent thermique”.
Reste donc le marché de l’occasion, privilégié par une majorité d’automobilistes. Il est cependant “encore peu développé” en électrique et, méfiance, il y a “un problème de compatibilité des véhicules électriques déjà anciens avec les systèmes de recharge actuels ayant connu un progrès technologique rapide”, souligne l’Institut de l’économie pour le climat I4CE, un think thank français.

Une décote plus rapide

Et surtout la dépréciation des voitures électriques est bien plus importante que celle des thermiques. La courbe de dépréciation d’une voiture électrique démarre au même niveau que celle d’un diesel. Mais la vitesse à laquelle elle chute est beaucoup plus importante souligne le site spécialisé Autovista. En clair, pour l’électrique, la valeur résiduelle est largement inférieure à celle d’une voiture thermique alors que le prix d’achat neuf est plus élevé. Une étude américaine récente révèle que certaines voitures électriques perdent plus de 30% de leur valeur au bout d’un an d’utilisation. Et c’est pire encore pour les modèles les plus chers qui peuvent perdre plus de 40%.

Après avoir atteint des sommets l’an dernier, les prix de l’occasion se sont un peu calmés a révélé le site de revente entre particuliers Leboncoin.

Si on regarde les ventes par type de carburant, “les prix baissent sur toutes les énergies”, souligne le site.
Mais dans le détail, ce sont les voitures électriques qui ont accusé la plus nette baisse de prix (-13,0%, à 26.420 euros).

Même constat pour le site La Centrale: Les prix des voitures électriques et hybrides d’occasion ont baissé de 13% sur un an en France au troisième trimestre 2023, selon leur baromètre trimestriel. “Nous constatons les premiers effets de la baisse de prix des Tesla et l’arrivée des constructeurs chinois sur le marché de l’occasion”, en plus d’une hausse générale de l’offre, note Anais Harmant, directrice marketing du site La Centrale, qui rassemble les annonces de concessionnaires automobiles.

Au contraire, le prix des voitures diesel d’occasion a progressé de 4,1% sur un an et de 1,8% sur un trimestre, en raison notamment de la “raréfaction de l’offre”.
Celui des modèles à essence a augmenté de 1,2% par rapport au troisième trimestre de 2022.

Il y a une autre raison pour laquelle la décote des voitures électriques est plus importante. Cette technologie est plus exposée à la dépréciation du cycle de vie que les modèles à moteur à combustion interne. Cela s’explique par les progrès technologiques considérables tels que l’augmentation de l’autonomie, qui ont été réalisés ces dernières années.

“Les voitures électriques lancées en 2021 et 2022 ont en effet une autonomie moyenne de 450 à 500 km. Cela fait baisser le prix de la plupart des VEB d’occasion proposés aujourd’hui, qui ont généralement entre quatre et cinq ans et une autonomie plus faible” souligne Autovista.

Un phénomène irrationnel ?

Pour Guido Savi, secrétaire général de l’Alia, l’Association Luxembourgeoise de l’Industrie automobile, les dernières générations d’électriques bénéficient d’une plus grande autonomie et la durée de vie des batteries de dernière génération est plus longue que prévue. Les tests réalisés par Aviloo démontrent qu’une batterie qui équipe une voiture électrique récente perd maximum 10% de sa capacité après 5 ans d’utilisation intensive.

Une voiture électrique comporte moins de pièces en mouvement, moins de pièces d’usures (embrayage, etc), donc moins de remplacement potentiel. Elle nécessite moins d’entretien (pas de vidange moteur, huile de frein, etc).

Enfin les moteurs électriques ont une durée de vie très élevée et l’électricité est moins chère que les carburants fossiles. Il n’y a donc aucune raison valable pour que la valeur résiduelle des voitures électriques soit moins élevée que celle des voiture essence ou diesel.

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