Médecins Sans FrontièresLa bande de Gaza est devenue "une tombe à ciel ouvert"

Gaël Arellano
La guerre et la famine font rage dans la bande de Gaza. Le résultat des bombardements et du blocus israélien sur l'aide humanitaire. De nombreuses organisations telles que Médecins Sans Frontières sont montées au créneau ces derniers jours.
Scènes de destruction à Beit Lahia, dans le nord de Gaza, le 15 mars 2025.
Scènes de destruction à Beit Lahia, dans le nord de Gaza, le 15 mars 2025.
© SAEED JARAS/Middle East Images via AFP

Après 18 mois de guerre et 50 jours de blocus sur l’aide humanitaire,Gaza est devenue une terre de désespoir”, a déclaré mardi le chef de l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (Unrwa), Philippe Lazzarini. Les principales organisations humanitaires actives dans la bande de Gaza font savoir qu’elles s’inquiètent désormais de la famine qui s’aggrave sur place.

Des Palestiniens font la queue pour une distribution de nourriture dans le camp de réfugiés de Nousseirat, dans le centre de la bande de Gaza, le 19 avril 2025
Des Palestiniens font la queue pour une distribution de nourriture dans le camp de réfugiés de Nousseirat, dans le centre de la bande de Gaza, le 19 avril 2025
© AFP

Médecins Sans Frontières dénonce pour sa part le déplacement forcé de centaines de milliers de personnes alors que les bombardements s’intensifient à Gaza. “Une atteinte délibérée à la capacité de survie d’un peuple”, affirme Amande Bazerolle, coordinatrice d’urgence de MSF à Gaza. Et pour cause, aucune cible ne semble être épargnée.

En témoignent les images de secouristes abattus alors qu’ils tentaient de porter secours à des civils pris dans des bombardements le 23 mars dernier. “Ce meurtre horrible de travailleurs humanitaires est un nouvel exemple du mépris des forces israéliennes pour la protection des travailleurs humanitaires et médicaux”, a commenté Claire Magone, directrice générale de MSF France.

Image tirée d'une vidéo récupérée sur le téléphone portable d'un secouriste tué à Rafah, diffusée par le Croissant-Rouge palestinien, le 5 avril 2025, montrant une ambulance du Croissant-Rouge palestien aux feux et gyrophares allumés derrière
Image tirée d’une vidéo récupérée sur le téléphone portable d’un secouriste tué à Rafah, diffusée par le Croissant-Rouge palestinien, le 5 avril 2025, montrant une ambulance du Croissant-Rouge palestien aux feux et gyrophares allumés derrière
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L’ONG rappelle qu’au moins 409 travailleurs humanitaires ont perdu la vie dans la bande de Gaza depuis le début du conflit, en octobre 2023. Parmi ces victimes figurent “11 collègues de MSFdont deux qui ont été tués au cours de ce mois d’avril. L’organisation assure d’ailleurs avoir été témoin de plusieurs incidents ayant entraîné la mort de travailleurs humanitaires et médicaux au cours des quatre dernières semaines.

Les structures médicales ne sont pas épargnées, peut-on lire dans le communiqué le plus récent de Médecins Sans Frontières. Les équipes ont de ce fait dû quitter certaines structures mises en danger par les frappes israéliennes et les tirs de roquette du Hamas. “Nous dénonçons fermement ces actions des parties belligérantes et les appelons à respecter et à protéger les structures de santé, les patients et le personnel médical”.

Plus de 51.000 morts dont beaucoup d’enfants

D’après les derniers chiffres officiels, plus de 51.000 personnes ont été tuées depuis octobre 2023,dont près d’un tiers sont des enfants” souligne l’ONG. Et le conflit pourrait prendre un nouveau tournant dramatique avec le blocage de l’aide humanitaire qui a commencé le 3 mars. “Le siège total de Gaza a épuisé les stocks de nourriture, de carburant et de médicaments”, écrivait MSF la semaine dernière.

Les images de dévastation dans le quartier d'al-Tuffah de la bande de Gaza, le 4 avril 2025
Les images de dévastation dans le quartier d’al-Tuffah de la bande de Gaza, le 4 avril 2025
© AFP

Si les conséquences de ce blocus peuvent paraître évidente, l’organisation humanitaire rappelle que le manque de réapprovisionnement en carburant “entraînera inévitablement la suspension des activités, les hôpitaux dépendant des générateurs pour l’électricité. Une coupure de courant pourrait signer l’arrêt de mort de nombreux patients qui se trouvent dans un état grave. Et c’est sans parler de ceux qui ont besoin d’une opération vitale.

La réponse humanitaire à Gaza s’effondre face à l’insécurité et aux pénuries”, alerte Médecins Sans Frontières dans un communiqué envoyé à la presse la semaine dernière. Onze ONG se sont depuis jointes à ce cri d’alarme. “Laissez-nous faire notre travail”, lançait un collectif de douze organisations humanitaires dont fait partie MSF il y a quelques jours. Ce mardi, c’était au tour du chef de l’agence de l’ONU de monter au créneau.

Mettre fin à la “punition collective”

Un Palestinien à côté de corps de proches tués dans une frappe israélienne et transportés à l'hôpital indonésien de Beit Lahia, dans le nord de la bande de Gaza, le 17 avril 2025
Un Palestinien à côté de corps de proches tués dans une frappe israélienne et transportés à l’hôpital indonésien de Beit Lahia, dans le nord de la bande de Gaza, le 17 avril 2025
© AFP

Philippe Lazzarini demande à ce qu’Israël mette fin à sa “punition collective. “L’aide humanitaire est utilisée comme une monnaie d’échange et une arme de guerre”, a-t-il dénoncé. Cela entraîne une aggravation de la famine qui se développe aux quatre coins du territoire palestinien. De son côté, MSF affirme que l’intensification des offensives militaires israéliennes a transformé la bande de Gaza “en une véritable tombe à ciel ouverte, pour les Palestiniens et ceux qui tentent de les aider”.

Le seul espoir en vue est désormais celui d’une trêve comme celle qui avait été décrétée le 17 janvier dernier. Elle avait permis le retour en Israël de 33 otages, incluant huit morts, en échange de la sortie d’environ 1.800 Palestiniens des prisons israéliennes. Une délégation du Hamas est actuellement en route pour le Caire afin d’y discuter de “nouvelles idées” concernant une trêve dans la bande de Gaza. Ces pourparlers interviennent quelques jours après le rejet par le Hamas d’une proposition de trêve israélienne. Autant dire que les espoirs d’un accord de trêve sont minces à ce stade.

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