Des camions remplis de tuyaux, de réservoirs de diesel, des barges sur le lac du Mirgenbach... Toute cette semaine la centrale nucléaire de Cattenom se prépare au pire. Comment ferait-t-elle si tous ses systèmes de secours devaient flancher?
La catastrophe nucléaire de Fukushima, le 11 mars 2011, a marqué les esprits et a eu pour conséquence de renforcer la protection des centrales nucléaires contre les agressions externes et de mieux les équiper pour assurer leur ravitaillement en eau et en électricité en cas de crise. Comment la centrale de Cattenom ferait-elle face si l'inimaginable devait se produire?
Depuis lundi et jusqu'à ce jeudi, des équipes et des matériels inhabituels circulent dans et autour de la centrale nucléaire mosellane. Un exercice qui s'y produit seulement une fois tous les trois ou quatre ans est en cours. Le scénario imaginé est "un séisme de très grande ampleur, largement supérieur au séisme historiquement le plus important" dans la région, pose Jérôme Le Saint, directeur de la centrale de Cattenom.
Un événement extrême qui mettrait sur la touche tous les moyens de secours et rendrait même inopérants des moyens d'ultime secours qui sont venus renforcer la sûreté de la centrale depuis Fukushima. Comme les "protections grands vents" pour protéger les installations en cas de tornade ou les "diesels d'ultime secours", des groupes électrogènes qui permettent d'alimenter en électricité les systèmes de sûreté.
L'enjeu le plus important, en cas de catastrophe majeure, serait de refroidir le cœur du réacteur. "Pour éviter les rejets radioactifs dans l'air, il faut toujours refroidir le combustible pour éviter qu'il ne fonde", explique Jérôme Le Saint. Même si l'accès à la centrale serait impossible à cause des dégâts du séisme, les moyens humains et matériels de la Force d'Action Rapide Nucléaire (FARN) permettront "d'apporter de l'eau, fournir de l'électricité pour l'ensemble des matériels de secours de la centrale et de l'air", assure Olivier Le Roux, directeur de la direction de crise du FARN. De sorte à pouvoir refroidir l'eau de la piscine en permanence et éviter l'ébullition.

Olivier Le Roux: "Un exercice comme celui-ci a demandé six mois de préparation pour être le plus efficace possible". / © Maurice Fick / RTL
C'est suite au rapport de crise du directeur de la centrale et sur ordre d'EDF que la FARN est mobilisée pour porter secours à la centrale: "Les premières équipes vont arriver dans les 12 heures et l'ensemble des équipes seront à disposition de la centrale dans les 24 heures", glisse Olivier Le Roux.
Pour accéder "coûte que coûte" à la centrale en cas de crise, la FARN dispose de 300 hommes -des professionnels du nucléaire spécialement formés- est de moyens matériels conséquents: 45 camions "haute motricité", cinq barges pour transporter du matériel sur l'eau, 18 véhicules 4x4, des hélicoptères Super Puma et une flotte de robots téléopérés pour aller là où l'homme ne peut plus se rendre.

Dans un bâtiment en surpression de la centrale, plusieurs Postes de commandement s'activent pour diriger les opérations à mener sur le terrain. / © Maurice Fick / RTL
Pour la simulation de cette semaine à Cattenom, la FARN a mobilisé 75 hommes et une partie seulement de ses moyens matériels. Les équipes déployées sur la retenue d'eau du Mirgenbach s'entraînent à transporter le personnel de relève de la centrale et du matériel. Le lac simule une grande quantité d'eau qui empêcherait d'atteindre la centrale. Mais la FARN "doit être capable d'intervenir même si toutes les routes sont coupées et si le personnel ,e peut pas se rendre à la centrale", explique Olivier Le Roux
L'exercice a surtout pour objectif de tester la coordination entre les équipes de la centrale, la FARN et le SDIS 57 et de tester l'organisation de crise pour faire face au pire.
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