Le groupe Air a fait décoller le public réuni à l’abbaye de Neumünster mardi soir en revisitant son album culte, “Moon Safari”, un quart de siècle après sa sortie.
À la fin des années 90, la fièvre de la French touch a gagné le monde entier. Porté par des artistes de musique électronique, Daft Punk, Cassius ou Étienne de Crécy, ce courant musical a également mis en lumière des groupes plus difficiles à classer. Le duo Air, constitué par Nicolas Godin et Jean-Benoît Dunckel, fait partie de ceux-là.
Après une série de EP remarqués, piochant aussi bien dans la musique instrumentale des années 70 que dans le rock progressif ou l’avant-garde électronique, Air frappe un grand coup avec un premier album lunaire mais au succès planétaire, Moon Safari, sorti en 1998. Une réussite artistique qui sera confirmée deux ans plus tard avec l’impeccable bande originale du film Virgin Suicides de Sofia Coppola.
Plus de deux décennies plus tard et après de multiples projets en solo ou en collaboration, les deux musiciens ont décidé en 2023 de monter une tournée anniversaire pour les 25 ans de Moon Safari, tournée qui faisait étape au Luxembourg mardi soir.
C’est dans le cadre magique de l’abbaye de Neumünster que Jean-Benoît Dunckel (synthétiseurs, piano, chant) et Nicolas Godin (basse, synthétiseurs, chant, guitares), épaulés par le batteur Louis Delorme, ont installé leur dispositif scénique, une cage faite de glaces sans teint, de lumière et d'images, théâtre d’un voyage musical et visuel d'une grande finesse.
Dès les premières notes de la ligne de basse du titre d'ouverture, La femme d’argent, le public repart vers cette époque dorée où des artistes érudits et aventureux diffusaient le chic français à travers le monde.
Après avoir joué l'intégralité de Moon Safari, les trois musiciens ont parcouru le riche répertoire du groupe, ouvrant la deuxième partie avec le superbe Radian pour terminer, à l’issue du dernier rappel, sur un hypnotique Electronic Performers. Certes l’électronique est là, mais les trois musiciens n’en abusent pas, et c’est ce qui fait le charme de Air sur scène. Car c’est bien une formation organique que le public luxembourgeois a appréciée mardi soir, n’ayant que très peu recours aux artifices (quelques boucles rythmiques ou arrangements discrets dans l’arrière-plan, l’incontournable vocoder sur les voix). Les trois musiciens ne donnent jamais dans la facilité, et seule la subtilité dicte leurs choix, qu’ils soient musicaux ou visuels. Car la scénographie de grande classe a rendu justice à la musique désormais classique du duo parisien.