Au tribunal de Luxembourg a débuté lundi le procès de l'affaire du détournement de fonds d'un montant de 2 millions d'euros au détriment de la Caisse nationale de Santé. Quatre personnes sont poursuivies pour vol et escroquerie.

L'affaire avait éclaté début 2019, quand la Caisse nationale de Santé avait constaté qu’au sein de son administration, des fonds avaient été détournés par deux de ses agents. Les deux fonctionnaires avaient été suspendus et une plainte avait été déposée.

"C'était mon idée que je transfère l'argent et puis nous ferions moitié-moitié", a déclaré l'ex-collaboratrice de la CNS, aujourd'hui âgée de 56 ans, lundi à l'ouverture de son procès. Cela a débuté avec de plus petits montants. Elle
aurait eu besoin d'argent après son divorce, a-t-elle expliqué. Elle a convenu avec un ami d'enfance d'utiliser son matricule et de lui transférer un certain montant. L'homme, âgé maintenant de 53 ans, lui reversait ensuite la moitié de la somme. Cela a bien fonctionné les premières années. "C'était un peu comme dans une armoire pleine de chocolats, où l'on pouvait se servir comme on voulait", a déclaré l'accusée à la police. Mais les montants sont devenus de plus en plus gros.

À un moment donné, peut-être sans s'en apercevoir, les matricules des conjoints respectifs ont également été utilisés pour la fraude. Eux aussi comparaissent aujourd'hui. Ils n'auraient cependant rien su de tout cela, a précisé à plusieurs reprises l'accusée. Elle était "comme Robin des bois" et elle a "distribué l'argent". Une comparaison que la juge n'a pas appréciée.

Le fait que les conjoints n'auraient rien su, a amené la juge à demander comment il est possible de ne pas remarquer qu'il y avait tout à coup plus d'argent dans les comptes du ménage. "Nous ne vivions pas sur un grand pied", selon l'accusée. Après tout c'est quand même une somme de 1,2 million d'euros qui a atterri sur son compte au cours de la dizaine d'années (de 2009 à 2018) qu'a duré la fraude. Les enquêteurs ont trouvé des objets de luxe, tels que des montres et des sacs coûteux chez son ami, considéré comme un complice dans l'affaire. Ce dernier avait déjà de tels articles auparavant, d'après la prévenue, qui a toutefois aussi déclaré qu'il avait des soucis d'argent.

Mais comment est-il possible que toute cette fraude ne soit pas apparue au grand jour pendant si longtemps?

"Il n'y avait aucun contrôle là-bas", a indiqué l'ex-fonctionnaire, qui a travaillé à la CNS pendant 35 ans. Un fait qu'ont attesté à la fois un employé de la CNS et l'enquêteur de la police judiciaire. La femme connaissait bien le système. "Elle était en fait aussi son propre contrôleur", selon l'enquêteur. Des éléments fictifs ont été introduits dans le système afin d'effectuer les remboursements aux bénéficiaires. Le versement aurait alors fonctionné automatiquement.

Les premiers doutes à propos de remboursements auraient surgi en interne à la CNS fin 2018. Tout n'est apparu au grand jour que lorsqu'un étudiant a trouvé un document dans la photocopieuse, dans lequel le bénéficiaire était différent du véritable patient. Il a alors demandé conseil à un collègue de travail. Et c'est ainsi que l'affaire a éclaté.