
Si une cinquantaine de personnes étaient présentes à la vente aux enchères des quatre parcelles situées près de la place du Marché aux poissons, aucune n'a fait d'offre.
"Pas d'argent dans la salle ?" a demandé à plusieurs reprises en plaisantant le crieur de la vente aux enchères.
Si parmi le public présent, les curieux étaient nombreux, il y avait aussi des investisseurs potentiels. Mais personne n'a levé la main ou fait une offre. Pourquoi personne n'a tenté sa chance avec une somme dérisoire? Parce que la propriétaire, Madeleine "Mado" Funck, avait le droit de refuser toute offre.
L'estimation qui circulait dans la salle était que les vendeurs en attendaient au moins 10 millions d'euros. Potentiellement, l'ensemble, avec la célèbre tourelle où figure la devise luxembourgeoise "Mir wölle bleiwe wat mir sinn" (Traduisez: "Nous voulons rester ce que nous sommes"), comprend trois studios et neuf cafés ou restaurants ouverts à la location. Les parcelles de l'Îlot gastronomique mises en vente correspondent à 2.000 mètres carrés sur un terrain de 362 mètres carrés. Si on multiplie cette surface par le prix moyen du mètre carré dans la vieille ville, le terrain seul vaudrait environ 6,2 millions d'euros.
Aucune mise n'ayant été faite, au bout d'une trentaine de minutes, le notaire a informé la salle que la propriétaire annulait la vente aux enchères. La dame, qui se trouvait dans une autre salle de l'hôtel, n'a pas souhaité s'exprimer.
Il faut préciser que seul l'Îlot Gastronomique faisait l'objet de cette vente aux enchères et pas l'ensemble du bloc situé entre la rue de l'Eau et la rue de la Loge, qui comprend également deux parcelles appartenant à la SA M Immobilier de la famille Libens et une parcelle propriété de Steiler Sarl.
ET MAINTENANT?
Le Notaire Pierre Metzler, en charge de la vente aux enchères, a confié à nos collègues de RTL que des "pourparlers" seraient en cours. Avec qui? Il n'a pas souhaité le révéler.
Il est évident que la vente aux enchères était inutile. A moins qu'elle n'ait montré aux acheteurs potentiels que l'intérêt pour l'Îlot était limité. Certes l'immeuble est situé dans la vieille ville, le coeur historique de la capitale, et est juste en face de la Résidence Siggi et ses appartements extrêmement chers. En revanche, pour le futur acquéreur de l'Îlot gastronomique, la marge de manoeuvre sera relativement étroite, car, selon le PAG de la ville de Luxembourg, l'immeuble est classé dans l'"Inventaire supplémentaire des monuments nationaux" et il est situé dans la zone Unesco.
Apporter des modifications au bâtiment n'est pas impossible, mais selon Robert L. Philippart, UNESCO Site Manager au Ministère de la Culture, il faudrait trouver des "solutions agréables et créatives" et cela, en étroite collaboration avec l'Institut national pour la recherche archéologique, ainsi qu'avec l'Institut national pour le patrimoine architectural, l'Unesco-Site-Management et les services de la Ville de Luxembourg. Monsieur Philippart a toutefois assuré qu'il n'y aurait pas de "muséification" de la capitale, peu importe la manière, la mixité et la vie dans ce quartier seraient préservées. En dépit de son classement, le bâtiment est partiellement en mauvais état. La mairie de Luxembourg a aussi posé des conditions au futur propriétaire: l'accès à la cour doit être réaménagé et un transformateur déplacé.
Si cela suffit. La locataire et gérante du restaurant "am Tiermschen", Hilary Porteous, a déclaré à nos collègues de RTL qu'après le décès de son mari Leon Nilles en 2016, Madame Mado Funck et ses enfants n'auraient plus investi un euro dans l'immeuble et auraient tenté de doubler les loyers.
Des neuf locaux destinés à accueillir un café ou un restaurant, que compte l'Îlot gastronomique, seuls trois sont encore occupés actuellement. Tous les autres sont vides, parce que les locataires précédents ont fermé et qu'ils n'ont pas été remplacés. Un seul des trois studios est occupé.
Le reportage de nos collègues de RTL (en luxembourgeois):