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Lorsqu'une opération médicale tourne mal, ou qu'un médecin commet des erreurs, le patient peut subir des conséquences durant toute sa vie. Entretien avec une avocate qui défend les victimes de ces "aléas thérapeutiques".
Les derniers épisodes de notre série "Erreurs Médicales" concernaient des personnes qui ont eu de mauvaises expériences médicales. Si vous pensez être victime d'une erreur médicale, vous pouvez entre autres introduire une plainte auprès du Collège médical ou du Conseil Supérieur de Certaines Professions de Santé. Mais tout le monde n'entreprend pas ces démarches, parce qu'elles sont chères et qu'il y a le risque de ne pas être remboursé.
L'avocate Trixi Lanners représente régulièrement des personnes qui ont eu des répercussions après une intervention médicale. Dans certains cas, une plainte est déposée.
"Toutefois, cela suppose que l'erreur représente également une infraction pénale et ce n'est pas le cas pour toutes les erreurs. On peut aussi saisir le tribunal civil, ce qui commence généralement par une procédure rapide pour qu'une expertise soit ordonnée. La plupart du temps un médecin étranger est nommé pour accomplir l'expertise. C'est un processus relativement rapide. Vous pouvez y trouver un accord ou pas, et si ce n'est pas le cas, ça prendra plus de temps."
Cela prendra plus de temps, car ça signifie poursuivre devant le tribunal civil où des expertises complémentaires peuvent être demandées et les différentes parties peuvent aller en appel, ça peut s'étirer sur plusieurs années. Si vous obtenez raison, c'est l'assurance du médecin qui payera.
"Il peut s'agir de dommage moral mais aussi matériel. Certaines personnes ont peut-être dû acheter une voiture pour transporter leur chaise roulante ou bien faire des constructions chez eux, ça peut aller très loin. Certains peuvent aussi nécessiter une aide de 2-3 heures par jour. Tout ça est calculé, si quelqu'un gagne moins d'argent ou ne peut plus travailler, ça peut prendre une envergure importante."
Le Conseil de discipline du Collège médical peut décider de sanctions envers un médecin. Ces sanctions peuvent aller d'une amende à une suspension.
Le Collège médical reçoit chaque année une centaine de plaintes, mais il n'est pas toujours question de dommages après un traitement mais aussi de tarifs qui sont remis en question. En 2021, il y a eu 31 plaintes où des traitements ont été mis en cause et 32 à cause du comportement de professionnels de santé.

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Mais selon Pit Buchler, président du Collège médical, il y a aussi des cas où le patient a en effet pu avoir des dégâts, mais où ce n'était pas la faute du médecin.
"L'erreur doit avoir été prouvée et pour prouver une erreur on a besoin d'une expertise pour pouvoir mettre en avant les différentes manières dont la situation peut être vue. Il y a un cas par exemple où ici au Collège médical nous avons estimé qu'il s'agissait d'une erreur médicale lors d'une opération. Une expertise a été faite et elle a expliqué que ce n'était pas le cas, ça pouvait arriver. C'était un aléa thérapeutique, ce qui peut survenir. Ce moment était vraiment catastrophique pour le patient, parce que ça faisait tellement longtemps qu'il était en incapacité de travail à cause des complications de l'opération."
C'est pourquoi le Collège médical réclame depuis longtemps un fonds d'indemnisation pour ce genre de cas, ce qui existe déjà en France et en Belgique.
"Les personnes qui ont un dommage à cause d'un aléa thérapeutique souffrent souvent beaucoup aux niveaux psychologique et financier. Le grand public pourrait en partie compenser cela financièrement par le biais d'un fonds." Ce serait une solution équitable pour tous les patients concernés.
"C'est juste vis-à-vis du médecin à qui il peut arriver quelque chose, le médecin va toujours souffrir s'il voit qu'il a causé du tort à un patient."
QUE FAIRE?
Si vous aussi vous pensez être victime d'une erreur médicale, plusieurs options s'offrent à vous. Le Médiateur Santé peut intervenir entre le patient et le professionnel de santé mais fonctionne aussi comme centre d'information. Il pourra trouver les contacts nécessaires comme la commission des plaintes dans les hôpitaux. Une plainte peut également être introduite auprès du Collège médical ou du Conseil Supérieur de Certaines Professions de Santé. Si une médiation n'aboutit pas, on peut toujours porter plainte contre la personne concernée, selon la gravité des faits, au pénal ou au civil.
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