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Le péage en flux libre, qui se développe sur les autoroutes françaises, peut se transformer en cauchemar pour les automobilistes. En particulier les étrangers ou les personnes âgées peu à l'aise avec les nouvelles technologies. Explications.
Les barrières de péage sont supprimées sur de nombreuses autoroutes françaises comme à Boulay sur l'A4 en Moselle ou sur l'A13 entre Paris et la Normandie. Elles sont remplacées par un système baptisé "flux libre"... qui n'est pas synonyme de gratuité et peut même se transformer en cauchemar.
Si le dispositif permet de ne plus avoir à s’arrêter, car des portiques calculent automatiquement pendant le trajet ce que chaque automobiliste doit payer, il manque de clarté, surtout pour les touristes qui ne parlent pas le français.
La Sanef assure avoir déployé 200 panneaux, quasiment un tous les kilomètres, pour rappeler aux automobilistes de régler la note. Mais, petit problème, ils sont presque tous rédigés en français.

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Pour payer, les automobilistes disposent de trois moyens: le télépéage pour ceux qui en sont équipés, se rendre sur le site de la Sanef - ou on peut opter pour un prélèvement automatique en associant sa carte bleue à sa plaque d'immatriculation - ou bien chez un buraliste.
Des majorations conséquentes !
Les clients ont 72 heures pour payer la facture. Au-delà, une contravention peut être appliquée allant de 10 euros pendant les 15 premiers jours à 90 euros jusqu'à 60 jours de retard. Ensuite, l'amende monte à 375 euros.
D'après Arnaud Quémard, le directeur général de la Sanef, sur l'A14, "la très très grande majorité a réglé dans les délais" sans préciser la proportion exacte d'automobilistes sanctionnés.
La société Sanef annonce avoir reçu 94% des paiements avant relance pour ses autoroutes A14 et A13 passées en 2024 en flux libre entre Paris et la Normandie. Mais de nombreux touristes qui n'auront pas bien compris le système risquent d'avoir une mauvaise surprise à leur retour de vacances.
Le passage en flux libre, "va permettre de gagner 30 minutes sur le trajet entre Paris et Caen lorsque la circulation est dense," assure M. Quémard. En l'absence de barrières de péage, les plaques d'immatriculation sont scannées par des caméras installées sur une trentaine de portiques tout au long de l'autoroute. "On considère que c'est l'équivalent de 30.000 tonnes de CO2 qui vont être économisées chaque année. Et en carburant, c'est l'équivalent de la consommation annuelle de 11.000 véhicules", poursuit le patron de la Sanef.
Mais il faut tout de même relativiser le gain de temps. Si vous ne disposez pas d’un badge de télépéage ou ne vous êtes pas inscrit en ligne au préalable, il faut s’arrêter à une borne de paiement ou aller dans un bureau de tabac pour payer. C'est donc plutôt une perte de temps.
Certains députés sont vent debout contre ce système. Le groupe LFI-NFP a déposé une proposition de loi pour interdire le développement des autoroutes à flux libre en France. Une partie de la gauche dénonce un "fiasco total avec 180.000 impayés en un an sur le tracé Paris-Caen, 80.000 dossiers de pénalités, et 170.000 demandes de rectification des parcours".
Aux incidents techniques à répétition s’ajoute une discrimination majeure contre les millions de Français "souffrant d’illectronisme ou qui ont des capacités numériques faibles".
La France n'est pas le premier pays à utiliser le flux libre, même si toutes les nouvelles autoroutes - des projets devenus rares si l'on excepte la controversée A69 - doivent en être équipées. À l'étranger en revanche, ces systèmes sont communs au Portugal, au Royaume-Uni, en Irlande et surtout aux Etats-Unis où la plupart des autoroutes sont en flux libre.
Les arnaques se multiplient
Depuis la mise en service du système sur plusieurs portions d’autoroutes françaises, les tentatives de fraude par SMS ou mail se multiplient. L’arnaque utilise le nom et l’identité visuelle d’Ulys, célèbre opérateur de télépéage du groupe Vinci. Le lien contenu dans le message renvoie vers un faux site, conçu pour voler vos données bancaires.
Comme toujours, les escrocs envoient ces messages en masse en comptant sur le fait qu’une partie des destinataires, même infime, tombe dans le panneau.