Interpellé par Belkhir Belhaddad, député de la Moselle, le ministre des Transports a laissé paraître une certaine inquiétude de l'État de voir le projet A31bis prendre le même itinéraire difficile que l'A69.

Vitale. Prioritaire. Complexe. Ce sont quelques-uns des adjectifs entendus à l'Assemblée nationale début juin pour évoquer l'A31bis.

Avant le lancement de l'enquête publique, qui doit déboucher sur une déclaration d'utilité publique, le projet d'élargissement de l'autoroute A31 fait du surplace. Ce qui inquiète les élus locaux, qui ont fait un appel du pied au gouvernement.

C'est aussi le cas de Belkhir Belhaddad, député de la Moselle. Ce mardi 3 juin, il a interpellé le ministre des Transports lors d'une séance de questions au gouvernement. "Ça fait maintenant plusieurs mois que le projet d'autoroute A31bis n'avance plus" a-t-il lancé dans l'hémicycle.

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© Domingos Oliveira / RTL

"L'actuelle A31, artère vitale pour les plus de 120.000 travailleurs frontaliers quotidiens, et corridor européen majeur pour le fret, est structurellement saturée et vieillissante. Les conséquences directes sont nombreuses : embouteillages quotidiens, accidents fréquents et un réseau secondaire également congestionné. Dans ce contexte, le projet A31bis incarnait une véritable solution."

Pour le député messin, pas de doute, "le calendrier du projet est d'ores et déjà retardé" et "le silence de l'État et de ses services inquiète fortement".

"Les élus locaux, les entreprises et les Mosellans ont besoin de visibilité. Il y a urgence monsieur le ministre" a-t-il encore assuré. Avant de rappeler que les efforts consentis sur les transports en commun "ne pourront pas, à eux seuls, absorber les flux de passagers à venir". Face à cette "urgence", le député implore l'État : "le projet d'A31bis doit être concrétisé selon le calendrier fixé initialement". À ce stade, les travaux sont envisagés à l'horizon 2030-2033.

L'État craint que le projet ne soit stoppé

Pour Philippe Tabarot, 4e ministre en charge du dossier depuis 2022, c'est presque un euphémisme de concéder que la réalisation de l'autoroute est "complexe".

En plus d'avoir traîné pendant plusieurs dizaines d'années, l'A31bis, déjà peu populaire auprès de certains habitants et associée à un coûteux péage, souffre désormais du "syndrome A69". En référence à cette portion d'autoroute en construction près de Toulouse mais qui a fédéré contre elle une importante mobilisation écologiste. Jusqu'au blocage judiciaire du chantier en mars, avant une reprise deux mois plus tard.

Aujourd'hui, l'État n'a qu'une crainte : que l'A31bis subisse le même sort. Quand bien même le projet est "attendu par la majorité des habitants", tente de rassurer le ministre. Si une majorité de soutien existe, elle est en tout cas bien silencieuse. Alors que les opposants au projet sont organisés et ne ratent jamais une occasion de dénoncer les défauts de cette A31bis.

"Je tiens à rappeler que le lancement d'un projet de cette envergure nécessite de nombreuses étapes et procédures, notamment sur le plan environnemental" continue le ministre. Et pour cause : la construction nécessite la destruction des zones boisées et naturelles autour de Terville, le long de l'autoroute, ainsi qu'à proximité immédiate du domaine de Bétange, dont l'allée des Marronniers doit rejoindre la liste des Monuments historiques français.

"Permettez-moi de rajouter que face aux procéduriers et à la pression contentieuse qui se pose sur les grands projets d'infrastructures, l'État prend toutes les précautions nécessaires pour s'assurer que ce projet respecte les plus hauts standards environnementaux."

"Le projet A31bis constitue un aménagement prioritaire pour l'État et je tiens à vous confirmer que nous sommes engagés et déterminés à faire aboutir ce projet structurant pour la mobilité en Lorraine" assure pourtant le ministre.

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Le tracé F4 retenu pour l'A31bis en contournement de Thionville. Avec ses zones sensibles, dont les entrées et sorties du tunnel qui passera sous Florange. Ainsi que l'Allée des Marronniers et le château de Bétange. / © Préfecture de la Moselle

En dépit d'une opposition locale très mobilisée face au projet, notamment sur le développement d'un tunnel sous Florange, le ministre rappelle le dépassement total de l'A31 actuelle, congestionnée au possible durant les heures de pointe. Au point que le moindre pépin sur la route fait aujourd'hui tousser l'ensemble du réseau routier du nord-lorrain.

"Cette infrastructure connaît des saturations récurrentes qui pénalisent les travailleurs frontaliers et les habitants de votre territoire" adresse le ministre à Belkhir Belhaddad.

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En heures de pointe du matin, le tronçon frontalier de l'A31 prend surtout la forme d'un long embouteillage en direction du Luxembourg. / © Domingos Oliveira / RTL

"Le dossier d'enquête publique pour le secteur Nord du projet est actuellement en cours de préparation par les services de l'État, sous l'autorité du nouveau préfet de Moselle." Ce pourquoi il ajoute avoir une "bonne nouvelle" : "la concertation préalable à l'enquête publique a ainsi été lancée le 28 mai dernier. Après les consultations obligatoires (...), nous visons le lancement de l'enquête publique à l'automne 2025, pour avoir une déclaration d'utilité publique dans les meilleurs délais." Courant 2026, au mieux, selon le dernier rapport disponible.

Un temps de préparation qui "semble trop long" pour les élus, les frontaliers et les riverains de l'autoroute. Mais il faut "donner toutes les chances à ce projet d'aboutir dans les meilleures conditions". Au risque de voir l'opposition locale au projet prendre une ampleur beaucoup plus importante.