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La France a publié ce mois de mars un décret qui va forcer les frontaliers au chômage à accepter une offre d'emploi moins bien rémunérée qu'à l'étranger.
La France remet ça. Après avoir abandonné son projet de rabotage des allocations de chômage des frontaliers, le gouvernement continue de s'en prendre à leurs droits.
À défaut de réduire le chômage perçu par les frontaliers, jugé coûteux pour la France du fait d'un règlement européen avantageux pour les pays voisins, le gouvernement a publié le 20 mars un décret qui oblige les frontaliers au chômage à accepter des offres d'emploi moins bien rémunérées.
Les frontaliers au chômage devront accepter un emploi moins bien payé
Ce décret définit ce qu'est une "offre raisonnable d’emploi" en France. Un critère utilisé pour juger si refuser une offre d'emploi auprès de France Travail est justifié, et donc conserver ou non ses indemnités de chômage.
Concrètement, refuser un emploi aux conditions salariales habituellement pratiquées en France pourra conduire les chômeurs frontaliers à perdre leur indemnisation. Quand bien même cet emploi est moins bien rémunéré que leur précédent poste, ce qui est souvent le cas pour de nombreux frontaliers embauchés au Luxembourg ou en Suisse, notamment.
Ce sera désormais le "niveau de salaire normalement pratiqué dans la zone géographique de sa recherche d’emploi", sur le territoire national, et non plus les salaires pratiqués à l'étranger, qui feront foi.

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L'"offre raisonnable d'emploi" tient compte du travailleur, de ses qualifications et compétences, sa localisation géographique et le salaire jugé "normal" près de chez lui pour un poste équivalent.
Pour ne pas perdre leurs indemnités, les demandeurs d'emploi sont "tenus d'accepter toute offre raisonnable d'emploi qui (leur) est proposée", et en cas de deux refus d'ORE sans motif légitime, risquent une radiation et une suppression de leur allocation, selon France Travail.
Le gouvernement justifie également la redéfinition de l'ORE par le fait que les frontaliers ont "un temps plus long de recherche d'un nouvel emploi" que les autres chômeurs: ils "consomment davantage leurs droits que les autres demandeurs d'emploi", à 41% contre 37% en moyenne.
La Confédération européenne des frontaliers, qui regroupe plusieurs associations de soutien, a fait savoir qu'elle montait au créneau contre un décret qui "institutionnalise un différentiel entre résidents français sur la base de leur lieu de domiciliation".
Après les frontaliers, la France vise le Luxembourg
La France compte également réformer les règles européennes d'indemnisation du chômage des frontaliers et présente la mesure sur l'ORE comme une "première étape".
Le pays cherche notamment à réduire le coût du chômage des frontaliers qui, sur base d'un règlement européen, sont indemnisés dans leur pays de résidence après avoir quitté leur emploi à l'étranger. Sans que le pays qui employait le frontalier n'indemnise pleinement la France.
En 2023, ce système avait coûté 800 millions d'euros à la France, dont plus de 137,1 millions d'euros pour les anciens frontaliers du Luxembourg. Pour y mettre fin, la France assure poursuivre ses "démarches diplomatiques" auprès de ses voisins, avantagés par le système en place : "Il s'agit enfin de réformer les règles européennes d’indemnisation du chômage des frontaliers, qui induisent aujourd’hui un déséquilibre financier de près de 800 millions d’euros par an au détriment de notre assurance chômage" a fait savoir la ministre chargée du Travail et de l’Emploi Astrid Panosyan-Bouvet.