
© Magali Cohen / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP
Un rapport de l'Unédic, le gestionnaire de l'assurance chômage en France, dévoile que le pays accumule une importante dette due aux prestations versées aux anciens frontaliers. Ces derniers étant indemnisés par la France, sans que leur pays de travail ne participe pleinement.
Avantageux pour le Luxembourg... mais coûteux pour la France. C'est ce qui caractérise le système européen de l'assurance chômage concernant les frontaliers. Dans un rapport publié début octobre, l'Unédic montre, chiffres à l'appui, comment l'indemnisation chômage des frontaliers coûte environ 800 millions d'euros par an à la France.
En effet, les textes européens stipulent aujourd'hui qu'un salarié frontalier qui perd son emploi - au hasard, au Luxembourg, 2e pourvoyeur de frontaliers pour la France derrière la Suisse - est indemnisé dans son pays de résidence. En France donc.
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Il existe, en compensation, un mécanisme de remboursement entre la France et le pays de travail du frontalier, qui perçoit les cotisations prélevées sur son salaire. Mais le montant du remboursement, compris entre trois et cinq mois de chômage, est quasi-systématiquement inférieur aux allocations versées par la France.

Plus de 120.000 frontaliers français se rendent chaque jour au Luxembourg. / © Maxime Gonzales / Archives RTL
En 2023, la France comptait 77.000 allocataires au chômage indemnisés après avoir perdu leur emploi dans un des pays voisins, souligne l'Unédic.
Pour les anciens frontaliers du Luxembourg, ce chômage s'élevait, en moyenne, à 1.781€ par mois. Bien plus que les 1.265€ par mois que touche un chômeur français, puisque les salaires luxembourgeois sont plus élevés.
Les chômeurs frontaliers du Luxembourg ont coûté 140 millions d'euros
En 2023, la France a donc financé environ 163,8 millions d'euros d'indemnisations chômage à quelque 17.000 anciens frontaliers du Luxembourg. Soit 16% de ses dépenses de l'année pour les indemnisations des frontaliers. Le Luxembourg versant à la France, en contrepartie, une compensation de 26,7 millions d'euros. Soit un déficit annuel de 137,1 millions d'euros pour le système français.
Entre 2015 et 2023, la perte accumulée par la France vis-à-vis du Luxembourg atteint 1,017 milliard d'euros. Et cette dette continue de grandir. "En effet, les frontaliers ne sont pas plus au chômage que le reste de la population", mais leur nombre augmente rapidement, note l'Unédic. Grâce, notamment, à des salaires plus élevés de l'autre côté de la frontière. Et à une dérogation qui permet au Luxembourg de limiter ses remboursements à trois mois d'indemnisation, quelle que soit la durée de travail effectuée au Grand-Duché.
En comptant également la Suisse, la Belgique et l'Allemagne, la dette française accumulée depuis 2011 atteint même les 9 milliards d'euros. Dont plus de 6 milliards pour la Suisse. Ces quatre pays "représentent plus de 99 % des dépenses d’indemnisation au titre des frontaliers chaque année" souligne l'Unédic. Sur la même période, le Luxembourg n'a remboursé, en moyenne, que 19% des dépenses de chômage de ses frontaliers.
Le chômage des frontaliers bientôt payé par le Luxembourg ?
Il existe bien un projet européen visant à transférer l'indemnisation chômage du pays de résidence (la France) au pays de travail (en l'occurrence, le Luxembourg) , mais celui-ci est à l'arrêt. Ce dont le Luxembourg ne se plaint pas : s'il entrait en vigueur, l'Adem (l'agence pour l'emploi), devrait gérer plus de 10.000 dossiers supplémentaires, et verser des millions d'euros d'indemnisation à ces chômeurs frontaliers allemands, belges et français.
À moins d'un déblocage du projet européen, il ne reste qu'une option à la France pour limiter ce poste de dépenses : trouver un accord bilatéral avec le Luxembourg.
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