C'est une véritable catastrophe industrielle pour le géant de l'automobile Stellantis. En Europe, près d'un demi-million d'automobilistes sont potentiellement concernés par les graves problèmes du moteur 1.2 PureTech. Et ils sont nombreux aussi au Luxembourg.

Les victimes potentielles de ce moteur sont plus d'un demi-million en Europe. Statistiquement de nombreux propriétaires luxembourgeois sont également touchés par les problèmes du tristement célèbre moteur essence PureTech 1.2.

Dorothée F. a acheté sa 208 en 2016. Rapidement, sa voiture commence a consommer énormément d'huile (jusqu'à un litre tout les 600 km). En 2021, le diagnostique tombe: il faut changer la courroie après seulement 63.000 km. Elle peut tout de même bénéficier d'une action du Groupe Stellantis qui permet de changer gratuitement la courroie.

Petit problème, le garage Peugeot de Leudelange refuse de faire l'échange au prétexte qu'une révision n'était pas faite chez-eux. Dorothée a beau expliquer que les révisions ont été faites à Bertrange dans une ancienne concession Peugeot avec cachet dans le carnet d'entretien, rien n'y fait.

Finalement c'est le garage Petry à Bissen qui accepte de changer la courroie de sa voiture. Mais les problèmes n'ont pas cessé pour autant. Malgré plusieurs interventions de professionnels, sa voiture continue de consommer énormément d'huile. Dorothée décide de changer de voiture mais s'estime lésée et craint pour la revente de son véhicule. Et son cas est loin d'être isolé, Dorothée fait partie des nombreux propriétaires touchés par les faiblesses de ce moteur.

Réduction de la taille mais augmentation des risques

À sa conception, ce moteur a été conçu pour répondre aux normes européennes (EURO 6) et réduire la consommation et donc la pollution des véhicules concernés. À l'époque, Peugeot a décidé d'adopter la stratégie du down-sizing en se dotant de cette nouvelle famille de moteurs essence 3 cylindres.

En clair on réduit les cylindres en essayant de conserver des performances élevées. La fabrication de ce moteur est confiée à l'usine de Trémery en Moselle. Le bloc équipe principalement les Peugeot 208, 308, 2008 et 3008, les Citroën C3, C4, C4 Cactus et C4  Picasso ainsi que les DS3 et DS4.

Paradoxalement, le bloc 1.2 PureTech a été élu "meilleur moteur de l'année" quatre années consécutives entre 2015 et 2018 avant de devenir la bête noire des garagistes.

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© Stellantis

Sans trop entrer dans les détails, les moteurs 1.2 PureTech ont été équipés de courroies en caoutchouc immergées dans l'huile du moteur. Cette solution permet d’atteindre de meilleures performances mais remet en cause la fiabilité. En effet, pour ces véhicules, l'usure prématurée de la courroie de distribution, va participer à saturer le bain d’huile de micro-copeaux arrachés à la courroie.

Résultat des pannes en cascades allant d'une simple surconsommation d’huile à des casses moteur. 
Les dépôts de caoutchouc dans l'huile affectent directement la lubrification du moteur. Si l’huile est polluée, elle peut endommager des pièces du véhicule et aboutir à la destruction du moteur qui serait évidemment très coûteuse. Plus grave encore, la dégradation de la courroie peut entraver le système de freinage du véhicule.

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© Stellantis

Sébastien Czerniak est lui aussi victime du moteur PureTech. Il s'était offert une Peugeot 308 neuve en 2015, et après 120.000 km parcourus, il constate une surconsommation d'huile. Ce n'est que le début des ennuis pour lui, puisque son moteur a lâché quelques semaines plus tard alors qu'il avait scrupuleusement entretenu son véhicule chez le concessionnaire, factures à l'appui. Il décide alors de créer une page Facebook qui compte aujourd'hui plus de 33.000 membres.

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© Capture d'écran Facebook

Sur sa page, les témoignages se multiplient et se ressemblent tous. Surconsommation d'huile, perte de puissance, auto allumage, voyants moteur, problème de freinage et, dans les cas les plus graves, moteur HS.

Un nouveau "motorgate" ?

Devant cette situation, et après avoir longtemps fait l'autruche, le Groupe Stellantis se résout à procéder à un premier rappel officiel en novembre 2020, puis un second en décembre 2022. Le constructeur annonce également l'extension de garantie de 6 à 10 ans et de 100.000 à 150.000 km pour les véhicules concernés. Stellantis propose des prises en charge au cas par cas, avec souvent un reste à charge important pour les victimes du moteur PureTech 1.2.

De nombreux  propriétaires décident alors d'entamer une action collective. Maître Christophe Lèguevaques, l'avocat du "Motorgate" de Renault représente 4.800 clients qui veulent "négocier avec Stellantis une prise en charge sérieuse à défaut préparer les recours judiciaires."

Mais l'action n'a pas été lancée d'un point de vue procédural. Maître Lèguevaques s'était donné jusqu'à fin juin pour négocier avec Stellantis, mais les négociations sont dans l'impasse. Les avocats du groupe auraient informé le représentant de l'action collective que le groupe automobile n'indemniserait pas les plaignants.

Il semble désormais inéluctable que l'avocat en charge du dossier passe à l'étape suivante, à savoir des poursuites judiciaires devant un tribunal pour faire plier Stellantis.

Et cela risque de ternir encore un peu plus  l'image du constructeur franco-italien déjà englué dans l'affaire des airbags défectueux.  Plus de 600.000 véhicules Citroën C3 et DS3 sont en cours de rappel pour de possibles défauts de leurs coussins gonflables de sécurité fournis par l'entreprise Takata, qui a fait faillite en 2017. Stellantis a appelé ses clients à ne plus utiliser leur véhicule tant qu'il n'est pas réparé.

L'UFC-Que Choisir a mis en demeure Stellantis  lundi de présenter des "solutions concrètes" pour ses clients affectés, dénonçant "l'incurie" dont fait, selon elle, preuve le géant automobile jusqu'ici.