Selon les associations Richtung22 et Lëtz Rise Up, le passé colonial du Grand-Duché n'est pas assez développé.
Grâce à une visite guidée à travers Luxembourg-Ville, les deux organisations souhaitent mettre en lumière cet aspect de l'histoire luxembourgeoise, si souvent occulté. Début du tour à la Villa Louvigny, sur le côté du parc, là où se trouve l'aire de jeu. Un panneau explique aux visiteurs le passé du bâtiment qui abrite de nos jours le ministère de la Santé.
"La Villa Louvigny était un lieu de fêtes et de spectacles au 20e siècle", explique Sandrine Gashonga de Lëtz Rise Up, "En 1900, un spectacle assez spécial fut organisé à cet endroit, une exposition humaine appelée "Exposition et spectacle des Amazones du Dahomey" présentant 53 personnes, des enfants, des femmes et des hommes. Une sorte de "zoo humain", comme on l'appellerait des nos jours, qui avait pour but d'exposer des personnes non-blanches issues des colonies et de montrer leur style de vie aux Européens".
Ces "expositions humaines" ne cesseront d'ailleurs pas avant des années, comme en témoigne la vidéo ci-dessus tournée au Luxembourg en 1929.
Le panneau explicatif devant la Villa Louvigny parle de la longue présence de RTL dans ce bâtiment, mais n'affiche plus aucune trace du passé colonial. La démarche des associations est de rendre visible cet aspect historique un peu "oublié". Elles revendiquent que les autorités expliquent aux citoyens ce qu'il s'y passait et que l'information soit rendue publique, ce que les associations souhaitent atteindre grâce aux visites guidées.
Lëtz Rise Up et Richtung22 ont préparé ce projet après plus d'un an de recherches afin d'organiser et de proposer ces visites dans le cadre de la campagne "Décoloniser le Luxembourg!" L'intérêt du public semble être au rendez-vous puisque ce week-end, tous les créneaux dans les trois langues luxembourgeois, français et anglais sont complets.
Près de l'arrêt de tram Charlie's Gare, de nombreux citoyens luxembourgeois ne peuvent s'empêcher de penser à la chanson "De Jhangli fiert den Houwald erop", mais peu d'entre eux connaissent son côté raciste. Un passage utilise même le "N-word", mais cet aspect semble avoir été oublié, comme l'indique Gabrielle Taillefert de Richtung22, qui est d'avis que le traitement de l'histoire coloniale du Luxembourg n'est pas assez mis en avant.
"Je ne pense pas que la solution est de tout effacer mais plutôt justement de contextualiser et d'affirmer que cela a existé. Ne pas en parler ne rend pas la chose plus visible, il faut expliquer pourquoi ce genre de comportement n'est pas correct et que, dans le cadre de la chanson, il ne faut pas ou plus chanter ce passage".
Les institutions publiques tout comme les entreprises privées sont pointées du doigt lors des visites guidées: "prenons par exemple le diadème de la famille grand-ducale qui provient du Congo belge et pour lequel la monarchie n'a jamais présenté ses excuses, c'est également une de nos revendications, des excuses publiques!" Mais pas seulement, puisque les associations demandent également l'ouverture d'un département au sein de l'Université du Luxembourg ou encore l'analyse de l'aspect colonial de la place financière luxembourgeoise.
Un débat public doit avoir lieu grâce aux recherches et à la campagne "Décolonisons le Luxembourg!". Cet été, Richtung22 et Lëtz Rise Up souhaitent proposer leurs visites guidées dans une promenade audio. Grâce à une application mobile, toute personne intéressée pourra découvrir à son rythme le passé colonial de la capitale grâce aux indications fournies.