© Shutterstock
Comment protéger le système des retraites ? Le Luxembourg explore plusieurs options, dont la très contestée prolongation des années de cotisations. Un rapport de l'IGSS dévoilé en juin montre malheureusement qu'il faudra généraliser l'effort, car un simple allongement des carrières ne suffira pas.
Travailler jusqu'à cinq ans de plus. La piste présentée en mai par Luc Frieden pour réformer les retraites au Luxembourg a effrayé de nombreux travailleurs.
Avec 40 ans de cotisations et un âge légal fixé à 65 ans, mais des départs réels qui surviennent plus tôt, le Luxembourg a dévoilé une partie de la recette qu'il pourrait concocter : allonger les carrières pour équilibrer son système des retraites, dont on annonce le déséquilibre financier dès l'année prochaine.
Dans un document technique paru en juin, l'IGSS a creusé cette piste de réforme du gouvernement. À savoir un allongement des carrières de trois mois par an, pendant 20 ans. Soit, en tout, cinq ans de plus pour boucler sa carrière au Luxembourg. Pour y parvenir, l'IGSS a développé deux scénarios démographiques :
- un scénario "prolongation" des carrières classique,
- un 2e avec un "prolongation sans croissance supplémentaire" de l'emploi. En partant du principe que le pays recruterait moins puisque les travailleurs resteraient actifs plus longtemps.
En allongeant les carrières de trois mois par an pendant 20 ans, les travailleurs les plus jeunes seraient les plus impactés par une telle réforme des retraites. / © Studio Republic / Unsplash
Grâce à ses estimations, l'IGSS constate logiquement que prolonger les carrières augmenterait le nombre de personnes qui cotisent et réduirait le nombre de retraités : en 2035, le pays gagnerait 24.000 cotisants de plus en 2035 et 18.000 retraités de moins. Jusqu'à 117.000 travailleurs supplémentaires en 2070 pour 129.000 pensionnés en moins.
Des projections à moyen et long terme donc.
Travailler plus longtemps ne protégera pas le système des retraites
L'IGSS constate que ce changement provoquerait deux effets qui se "contrebalancent": d'un côté, les dépenses seraient amoindries les premières années, car les travailleurs resteraient en poste. De l'autre, les dépenses augmenteraient ensuite car les carrières seraient plus longues et les retraites moyennes plus élevées.
Les deux scénarios étudiés ont un autre défaut : quoiqu'il arrive avec cette option, le système basculerait dans le rouge. Travailler cinq ans de plus ne ferait que retarder l'échéance... de quatre à cinq ans environ. Si rien n'est fait pour les retraites du Luxembourg, ce qui "n'est pas une option" a rappelé la ministre de la Sécurité sociale Martine Deprez, la réserve sera vide en 2045. En cotisant cinq ans de plus (scénario "Prolongation"), l'IGSS repousse cette bascule à 2050. Et même 2048 si l'allongement des carrières limite les recrutements du pays. Tout le contraire du financement "durable" des pensions voulu par le gouvernement.
Comme RTL Infos le rapportait dans cet article, la réforme des retraites ne pourra donc pas reposer sur une mesure unique. Aussi forte et abrupte soit-elle, comme l'a été la proposition de Luc Frieden.
Travailler cinq ans de plus ? Insuffisant. Passer les cotisations à 11% ? Insuffisant. La réforme des retraites, qui arrivera, c'est une certitude, devra bien s'appuyer sur plusieurs changements. Un cocktail d'ingrédients compliqué à mettre au point et qui, en fonction de l'issue des dernières négociations, pourrait avoir un goût amer pour certains.