Un commerçant installé près de la rue où un funiculaire a déraillé mercredi à Lisbonne témoigne, alors qu'il faisait partie des premiers sur place.

"J'ai vu beaucoup de corps, les uns sur les autres", raconte le commerçant bangladais Muhamad Farid Shrovo, un des tout premiers témoins arrivés mercredi sur les lieux du dramatique déraillement d'un funiculaire du centre de Lisbonne.

"C'était la première fois que je voyais autant de corps sans vie", témoigne auprès de l'AFP cet immigré de 35 ans qui travaille dans une boutique de souvenirs à quelques mètres des lieux de l'accident.

Mercredi peu après 18H00 locales (19H00 au Luxembourg), il entend un énorme bruit et aperçoit aussitôt au loin un grand nuage de poussière dans la petite rue du funiculaire de la Gloria, au cœur du centre touristique de la capitale portugaise.

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L'épave d'un funiculaire au lendemain de son déraillement à Lisbonne, le 4 septembre 2025 au Portugal. / © AFP

Un des deux wagons de l'ascenseur de la Gloria, qui relie le quartier de la "Baixa" à celui du "Bairro Alto", perché sur l'une des collines de la capitale portugaise, vient de dévaler la pente et de finir par dérailler pour s'écraser contre le mur d'un immeuble.

Le dernier bilan fait état de 16 morts, dont 11 étrangers, et une vingtaine de blessés.

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© PATRICIA DE MELO MOREIRA / AFP

Avec un ami portugais, Farid quitte sa boutique et traverse la place pour se précipiter sur les lieux de l'accident.

Sur place, c'est le chaos: des blessés, des débris jaunes et blancs aux couleurs du funiculaire jonchent le sol. D'autres passants, incrédules, se dirigent vers les lieux pour porter secours aux blessés.

"Pendant les cinq ou six premières minutes, nous ne pensions qu'à aider", mais "pour la plupart des victimes, nous avons compris qu'il n'y avait plus grand chose à faire", confie-t-il vendredi.

"Elles ne bougeaient plus, ne demandaient pas d'aide, restaient en silence", poursuit ce musulman "très pratiquant" qui a filmé la scène pendant quelques secondes avec son téléphone portable dans une vidéo où on l'entend répéter sous le choc "Allah Ahkbar" (Allah est grand).

"C'est inoubliable"

Puis tout à coup, il entend un enfant pleurer, "le visage et les jambes couverts de sang". "Calme toi, calme toi", dit-il plusieurs fois à l'enfant que son ami portugais prend dans ses bras. Puis, très rapidement les secours arrivent et ils le confient à un secouriste pour qu'il soit pris en charge.

La police "nous a demandé de nous éloigner car la zone présentait toujours un danger" avant de "boucler complètement" les lieux, précise ce Bangladais installé au Portugal depuis une dizaine d'années.

"Je n'oublierai jamais cet enfant, son visage ensanglanté, ses pleurs, la manière dont il a tendu les bras... C'est inoubliable", poursuit cet homme en disant avoir alors pensé à sa fille de 20 mois.

Âgé de trois ans, le petit garçon de nationalité allemande était le seul enfant parmi les victimes de l'accident et s'en est sorti avec des blessures légères.

Selon des informations de presse, il ferait partie d'une famille de touristes allemands. Les autorités portugaises ont simplement confirmé qu'il y avait aussi une femme et un homme de cette nationalité parmi les blessés.

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Des employés de la société Carris, gestionnaire des transports publics à Lisbonne, travaillent sur le site de l'accident du funiculaire de Gloria,dont les débris ont été déblayés, le 5 septembre 2025.

Sur les 16 morts dénombrés figurent cinq Portugais et plusieurs étrangers, trois Britanniques, deux Sud-Coréens, deux Canadiens, une Française, un Suisse, un Américain et un Ukrainien.

Ce drame a profondément marqué Muhamad Farid. Le soir de l'accident, "je n'arrivais pas à manger, ni à dormir", dit-il avant d'ajouter: "aujourd'hui, j'essaye de reprendre une vie normale, mais ce souvenir restera gravé à jamais dans ma mémoire".