Friedrich Merz a paraphé lundi le contrat de coalition de son nouveau gouvernement entre conservateurs et centre gauche, à la veille de son élection au poste de chancelier, promettant de "faire avancer" l'Allemagne en ces temps "de grande incertitude".

Cette feuille de route pour les quatre ans à venir fixe les priorités pour la première économie européenne. Les défis sont nombreux pour cet homme de 69 ans, dénué d'expérience gouvernementale et plutôt impopulaire dans son pays, même si son parti a - difficilement - remporté les législatives de fin février.

L'ancien rival d'Angela Merkel devra relancer l'économie de l'Allemagne, en récession depuis deux ans, freiner l'essor du parti d'extrême droite Alternative pour l'Allemagne (AfD) et soutenir le renforcement de la défense européenne face au désengagement stratégique américain et à une menace russe accrue.

Mardi, il sera officiellement élu chancelier par les députés du Bundestag, en vertu des règles du système parlementaire allemand, après la victoire de son camp conservateur aux élections. Son équipe gouvernementale sera aussi constituée.
"Vous aurez un gouvernement déterminé à faire avancer l'Allemagne grâce à des réformes et à des investissements, un gouvernement qui s'efforcera dès le premier jour d'être fiable", a déclaré lundi Friedrich Merz.

Il s'en est d'ores et déjà donné les moyens en faisant adopter un programme d'investissements géants - de plusieurs centaines de milliards d'euros - pour réarmer et moderniser son pays. Et en assouplissant pour ce faire les sacro-saintes règles nationales limitant les déficits publics.

"Devoir historique" de réussir

"Nous vivons une période de profonds changements, de bouleversements majeurs et de grande incertitude", a dit le prochain dirigeant de l'Allemagne pour quatre ans.

"C'est pourquoi nous savons qu'il est de notre devoir historique de mener cette coalition vers le succès. Nous sommes déterminés à y parvenir", a-t-il insisté, à moment où l'extrême droite parie, quant à elle, sur un échec et rêve de gagner les prochaines législatives de 2029.

Certains sondages donnent d'ailleurs aujourd'hui cette dernière en tête des intentions de vote. Et ce alors même que le parti AfD vient d'être classé "extrémiste" et qualifié de menace pour "l'ordre démocratique" par le Renseignement intérieur. Une mesure contre laquelle ce mouvement a engagé lundi un recours en justice.

M. Merz prendra le relais du social-démocrate Olaf Scholz, sévèrement battu en février.

Sa coalition inédite avec les Verts et les libéraux du FDP s'était effondrée le 6 novembre 2024, le soir même de la réélection de Donald Trump aux fonctions de président des Etats-Unis, après des divergences incessantes sur les priorités budgétaires devenues insurmontables.

"Le nouveau gouvernement a plus que jamais besoin d'un véritable travail d'équipe", a souligné à cet égard Lars Klingbeil, le futur vice-chancelier et ministre des Finances.

Migration et Défense

Friedrich Merz va devoir rapidement tenir ses promesses sur une réduction de la migration, après plusieurs attaques meurtrières ayant impliqué des étrangers pendant la campagne électorale et qui ont favorisé le score historique de l'AfD, arrivé deuxième aux législatives avec un peu plus de 20% des voix.

"Toute personne qui tente d'entrer illégalement en Allemagne doit s'attendre, à partir du 6 mai, à être refoulée à la frontière allemande", a déjà prévenu son bras droit Thorsten Frei.

Autre grand chantier, rapidement remettre à niveau l'armée nationale, à la fois pour assurer la défense de l'Allemagne et sa contribution à l'Otan voire à un renforcement de la défense européenne.

Il s'agira aussi de garantir un soutien militaire à l'Ukraine face à l'invasion russe, alors que Donald Trump a opéré un revirement dans ce domaine.

M. Merz pourra en particulier s'appuyer sur l'énergique Boris Pistorius, ministre social-démocrate de la Défense sous Olaf Scholz, reconduit lundi à ce poste devenu clé.

Le populaire ministre est l'un des sept ministres sociaux-démocrates du gouvernement désignés lundi par leur parti, qui détiendra aussi notamment le ministère des Finances avec Lars Klingbeil, ainsi qu'entre autres l'Environnement, le Travail et la Justice.

Les conservateurs de la CDU seront quant à eux à la tête de dix ministères, dont celui des Affaires étrangères avec Johann Wadephul, également fervent soutien de l'Ukraine et critique de Poutine.