Hey ! Il y a des bulles dans RTL 5minutes… Champagne ?! Non, BD ! Bienvenue dans ce rendez-vous autour de la bande dessinée. L’idée: on lit et on vous en parle. Pas de préjugés: Franco-belges, mangas, comics, majors ou indépendants... si ça mêle dessins et textes, on vous invite à découvrir.

Pour cette première rubrique: une mort tragique, une deuxième et… une troisième (promis, c’est un hasard), un penchant pour les héroïnes et d’autres découvertes. Alors, on s’installe confortablement. On laisse la pluie, la brume et la nuit se faire une place derrière les carreaux et… bonnes lectures.

LA MORT D'UN HÉROS ?

La mort de Spirou, c’est le terrible titre du 56ème tome des aventures du célèbre groom reporter. Serions-nous témoins de la disparation de Spirou, personnage imaginé par l’éditeur Jean Dupuis en 1938 ? Conduit depuis dans ses aventures par des artistes comme Jijé, Franquin, Fournier ou Tom & Janry, c’est un pilier de la BD qui a réjoui plusieurs générations de lecteurs.

Ce dernier opus commence pourtant de la plus simple des manières. Notre héros, son comparse Fantasio et leur écureuil de compagnie Spip prennent des vacances et évoquent les préparatifs de la fête prévue en l’honneur des 100 ans de leur éditeur. Un reportage publié par leur consœur Seccotine interpelle alors Spirou, "Ce n’est pas du journalisme, c’est de la pub…", constate-t-il. Une remarque qui va plonger le trio dans une sombre aventure au cœur d’une base sous-marine transformée en village de vacances au succès trouble…

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© Dupuis

Portée par un duo inédit au scénario, Benjamin Abitan et Sophie Guerrive, et signé Schwartz au dessin, cette aventure de Spirou n’est pas la plus originale, dommage. Mais son final, qui voit disparaître notre héros dans les abysses et laisse un Fantasio inconsolable, cache aussi une annonce fracassante qui peut expliquer, un peu, la légèreté du scénario de cet opus de transition. Le héros est mort, vive l’héroïne ? Affaire à suivre…

La mort de Spirou Les aventure de Spirou et Fantasio Tome 56 de B. Abitan, S. Guerrive et Schwartz- 59p. 11,90€ - Dupuis

UNE PLONGÉE DANS L'HISTOIRE DU DAHLIA NOIR

Los Angeles, 1947, fin des horreurs de la guerre, mais pas de ses traumatismes, début du star-system hollywoodien, les paillettes et leurs mirages. Le 15 janvier, une découverte, un corps affreusement mutilé a été laissé sur le bas-côté en friche d’un lotissement en construction. C’est le cadre de ce qui restera dans les annales du crime comme l’affaire du Dahlia Noir. Un fait divers sanglant entrée depuis dans les recoins sombres de la pop culture.

Dans A Short Story les auteurs Run et Florent Maudoux balaient cette iconisation glauque de l’affaire. Ils retracent au prix d’une enquête de plusieurs années la vie de la véritable victime de ce fait divers, Elizabeth Short. Articles de presse d’époque, témoignages, archives du FBI et du LAPD… tout a été épluché par le scénariste Run. "C’est une histoire qui me fascine depuis longtemps", confie t-il. "Je voulais aller au-delà de la mystification. Comprendre qui était ce personnage dont on ne connaît quasi pas l’histoire." Pari réussi tant l’ouvrage nous plonge dans la vie d’Elizabeth.

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Les auteurs Run et Florent Maudoux, au centre, lors de la présentation de Short Story. Soirée qui marque aussi l'entrée du label 619 au sein des édition Rue de Sèvres. / © MG

Cela marche aussi grâce au choix radical de la mise en page. Elle alterne des pages de texte, illustrées de documents originaux qui racontent chronologiquement les événements et aussi des planches dessinées qui nous immergent dans l’histoire, son ambiance. Des dessins qui renforcent l’attachement à l’héroïne. Un exercice d’équilibriste du dessinateur Florent Maudoux qui précise: "On sait qu’elle va mourir. Notre but c’était de la faire vivre."

Un soin de publication, marque de fabrique du Label 619, qui met ainsi l’ouvrage au service de la narration. Cela permet aussi au lecteur de s’improviser détective. Il a tous les éléments en main et les auteurs ont veillé à ne pas prendre parti pour les différentes théories développées sur ce cold-case.

"On a juste raconté la trajectoire d’une femme qui voulait être heureuse", explique Florent Maudoux. De Jane Doe à Elizabeth Short, A Short Story est l’exemple que la vie des victimes de meurtre mérite de susciter au moins autant d’intérêts que la fascination exacerbée pour leurs tueurs. Une belle leçon donnée par cette bande dessinée qui prouve encore que le médium peut être un puissant support des contenus les plus divers.

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© Label 619 / Rue de Sèvres

A short Story La véritable histoire du Dahlia Noir de Run et Florent Maudoux - couleur ou noir  et blanc, 112p. 19,90€ - Label 619 / Rue de Sèvres

MANGA, GLA, GLA...: UN THRILLER QUI FAIT FROID DANS LE DOS

Manque d’inspiration ou envie de découverte, un conseil: allez chez un libraire. Dans le domaine de la bulle, de nombreux lieux sont maintenant accessibles aux néophytes comme aux aficionados. Donc, direction la boutique spécialisée manga de ma ville avec deux critères en tête: sorties récentes et nombre de tomes restreints. Après quelques échanges, un titre ressort : Mon mari dort dans le congélateur. "Vous verrez c’est spécial", préviens le professionnel. OK, allons-y.

Avec l’adaptation de son roman à succès, l’autrice Misaki Yazuki signe un scénario qui va droit au but. Les premiers mots de la première page sont : "…j’ai tué mon mari." Nana dresse ce simple constat à la face du lecteur, debout devant le cadavre frais dudit mari. Pour cacher son meurtre, elle décide d’entreposer le corps dans le vaste congélateur stocké dans la remise du jardin. Objet hérité de son grand père toujours prêt à lui offrir des glaces. Enfin débarrassée de ce fardeau et ainsi libérée d’un mari violent et pervers, la jeune femme s’imagine renaître. Quelle désillusion quant à son réveil, l’époux haï ne semble pas résolu à quitter sa vie si facilement.

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© Akata

La mise en image d’Hyaku Takara passe par un trait délicat, presque naïf, qui contraste bien avec la violence du scénario et finalement mieux la rehausser. À l’image des violences conjugales, psychologiques comme physiques qui peuvent se cacher derrière la plus banale et engageante des façades. À coup d’images doucement chocs et de basses perversions, ce huis clos psychologique dérange, intrigue et questionne tout en conservant son attractivité. Le tome 2 devrait trancher entre coup de cœur ou coup de froid…

Mon mari dort dans le congélateur Tome 1 de Misaki Yazuki et Hyaku Takara - 186p. 8,05€, tome 2 disponible le 20/10/2022 - Akata

UNE COLLECTION POUR (RE)DÉCOUVRIR LE COMICS 

Si pour vous, comics rime forcément avec capes, collants, super-pouvoirs et bastons intergalactiques, l’éditeur Urban Comics / DC cherche à vous détromper. En tout cas, à vous permettre de découvrir que ce n’est pas que ça. Comment ? En publiant plusieurs de ces classiques dans un format bon marché et facile à transporter. Caractéristique qui donne son nom à la collection, Nomad.

Destinée à paraître par vague, la première fournée est éclectique. Le superhéros maison, Batman, est présent avec des œuvres qui mettent l’accent sur la face "enquêteur" du personnage, mais aussi des classiques comme le fameux Killing Joke d’Alan Moore. Du même scénariste, le non moins classique Watchmen est disponible.

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© Urban Comics

La science-fiction et la fantasy sont aussi mises en avant. On trouve le déjanté Transmetropolitan de Warren Ellis et Darick Robertson ou la série Fables. Une revisite inspirée et très personnelle des contes traditionnels par Bill Willingham, portée par le sublime coup de crayon de Mark Buckingham.

Rien de très récent et certains dessins souffrent un peu de la réduction de format, mais une très bonne façon de toucher un nouveau public ou de découvrir de nouveaux titres. Surtout que l’éditeur assure que les séries seront entièrement publiées dans cette collection. Une tentative de coup de boost pour un segment de la BD qui cherche un nouveau souffle.

10 titres déjà disponibles - de 5,90€ à 9,90€, prochaines sorties en janvier 2023 - Urban Comics / DC

EXTRA DIGITAL: UN CAFÉ ET UN STRIP, SVP !

Évolution oblige, l’univers de la BD sort des carcans du papier pour chercher à s’épanouir dans le monde numérique, notamment sur les réseaux sociaux. Une façon de s’ouvrir aux usages des plus jeunes lecteurs. C’est en tout cas la cible, mais pas seulement, du compte Instagram Mâtin, quel journal ! lancé par les éditions Dargaud.

L’idée est de publier chaque matin un strip, sous forme de carrousel, sur des sujets d’actu ou des réflexions dans l’air du temps. Pépinière d’auteurs au styles et réflexions très différents, la liberté de ton est de mise. Parfois amer, acide ou salé, la 1000ème de ces mignardises est récemment sortie du four. À déguster sans modération, café ou pas.

FIN

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