
Un mot. Une image. Un commentaire. Parfois, il suffit de peu de choses pour déclencher une vague de haine en ligne. À l'heure où les plateformes numériques sont des lieux d'expression incontournables, les discours violents ou discriminatoires s'y répandent plus vite que jamais - souvent sous couvert d'opinions personnelles, parfois en toute impunité. Comment reconnaître ces dérives, y répondre efficacement et défendre une liberté d'expression responsable ? Tour d'horizon d'un phénomène qui nous concerne tous – et auquel BEE SECURE répond par des ressources et un accompagnement concret pour mieux protéger chacun dans l'espace numérique.
La liberté d'expression : un droit fondamental, mais pas sans bornes
La liberté d'expression est un pilier essentiel des droits de l'Homme et constitue un des fondements de toute société démocratique. Elle garantit à chacun le droit de partager ses idées, même celles qui dérangent ou provoquent des débats. Cependant, ce droit fondamental n'est pas sans limites. Celles-ci sont atteintes lorsque les mots deviennent des armes, alimentent la haine ou incitent à la violence.
Cette tension entre liberté d'opinion et dérives haineuses soulève donc une question cruciale : jusqu'où peut-on aller ?
Combattre le discours de haine, ce n'est pas restreindre la liberté d'expression. C'est au contraire protéger l'espace public, préserver la dignité de chacun et garantir une parole libre mais responsable. Le droit d'exprimer une opinion s'accompagne du devoir de ne pas nuire à autrui.
En ligne comme ailleurs, nos mots ont du poids. À nous d'en faire bon usage et de faire preuve de courage civique en signalant des contenus potentiellement illégaux.
Quand la haine en ligne prend de l'ampleur
L'usage de l'Internet a amplifié les phénomènes de discours de haine, surtout en période de crise. Que ce soit pendant la pandémie de Covid-19, dans le contexte de conflits internationaux ou face aux tensions sociales, les messages haineux se propagent vite — et leur impact peut être dévastateur.
La montée constante de signalements de contenus potentiellement illégal à la BEE SECURE Stopline montre que la haine en ligne reste un problème persistant qui nécessite une attention continue : 124 signalements en 2018, plus de la moitié avec 292 en 2020 et 448 en 2024.
Un enjeu réglementé
Effectivement, l'Internet est un espace public auquel chacun peut participer activement en publiant, commentant ou à travers le partage de contenu en ligne. Toutefois, comme dans tous les espaces publics, Internet est aussi soumis à des lois.
À l'échelle européenne, le Digital Services Act (DSA) entre en vigueur. Il impose notamment aux plateformes de prendre des mesures ciblées pour lutter contre les produits, services ou contenus illégaux en ligne, et ainsi protéger le grand public – en particulier les mineurs.
Bien qu'il n'existe pas de définition universelle claire du discours de haine, au Luxembourg, celui-ci est encadré et réglementé par le Code pénal luxembourgeois. Pour que les actes aient une portée pénale, un discours doit inciter à la haine ou à la violence envers une personne ou un groupe en raison de son origine, de son genre, de ses convictions, de son orientation sexuelle, de son handicap ou de sa religion, entre autres. Cette incitation à la haine ou à la violence doit être concrétisée par une communication publique, p. ex. des propos oraux ou écrits dans un espace public, des images ou des affiches. Il existe certainement quelques formes de discours de haine raciste indirects qui ne sont pas punissables.
Il ne faut pas non plus perdre de vue que d'autres lois s'appliquent dans d'autres pays, ce qui peut mener à des situations compliquées, surtout sur Internet.
Des réflexes simples pour réagir
Face au discours de haine en ligne, chacun peut agir. Il ne s'agit pas seulement de dénoncer, il s'agit d'empowerment (autonomisation) collectif, c'est-à-dire donner à chacun les moyens de se défendre, et de soutenir. Si vous êtes témoin ou victime de discours de haine, BEE SECURE conseille les étapes suivantes :
- Le contre-discours ou ignorer : Le contre-discours est la tentative de lutter activement contre le discours de haine. Ce faisant, vous montrez aux autres lecteurs que le discours de haine n'a pas sa place, aux auteurs qu'ils ne restent pas sans réponse, et aux victimes qu'elles ne sont pas seules. Toutefois, il est important de ne pas oublier de se protéger soi-même et de veiller à sa propre sécurité. Dans certains cas, ne pas réagir peut-être la meilleure option. Ignorer les propos haineux permet d'éviter de nourrir la provocation.
- Chercher du soutien : Parler à une personne de confiance ou contacter la BEE SECURE Helpline (8002 1234) permet de ne pas rester seul face à ces situations.
- Bloquer l'auteur : vous avez le droit de bloquer l'auteur.
- Signaler le contenu : La plupart des réseaux sociaux proposent des fonctionnalités permettant de signaler les contenus douteux. Sur la plateforme BEE SECURE Stopline, il est possible de signaler certains contenus de manière anonyme. Les contenus potentiellement illégaux sont alors transmis à la police nationale ou à d'autres autorités compétentes.
Toutefois, il est important de savoir que la BEE SECURE Stopline ne traite pas les cas individuels d'insultes ou d'injures, de cyberharcèlement, de fraude, d'informations erronées (hoax) etc. Dans les cas précités, les utilisateurs peuvent s'adresser à la BEE SECURE Helpline (8002 1234). - Porter plainte auprès de la police : L'important est de conserver les preuves (captures d'écran, messages sauvegardés).
Un quiz pour faire la part des choses
S'informer, agir, soutenir : chacune et chacun a un rôle à jouer pour que le web reste un espace de respect et de dialogue. Et cela commence parfois par une simple question : « Peut-on vraiment dire cela ? »
C'est la réflexion que propose le site nohateonline.lu à travers le quiz « Däerf een dat soen ? ». Les internautes y sont confrontés à des commentaires réels, repérés sur les réseaux sociaux et signalés à la BEE SECURE Stopline, et doivent décider s'ils relèvent ou non du discours de haine illégal.
En complément, la plateforme fournit des recommandations pratiques pour mieux comprendre les limites de la liberté d'expression en ligne et oriente vers le site stopline.bee-secure.lu pour effectuer un signalement anonyme de contenus potentiellement illégaux.
