Un départ d'une employée de la TAP Air Portugal avec une indemnité pharaonique a déclenché un scandale jusqu'au sommet de l'État.

Bras de fer et crise politique

Un bras de fer entre le président portugais et le chef du gouvernement sur le maintien d'un ministre impliqué dans un nouvel épisode du scandale "TAPgate", du nom de la compagnie aérienne publique, a engendré une crise politique au sommet de l'Etat.

"Lorsqu'il n'y a pas de responsabilité, il n'y a pas de crédibilité", a déclaré le président Marcelo Rebelo de Sousa lors d'une allocution jeudi soir, reconnaissant "des divergences de fond" avec le gouvernement.

"Je vais devoir être plus attentif et intervenir davantage"a-t-il affirmé tout en excluant de dissoudre, pour l'heure, le Parlement "afin d'assurer la stabilité" et "éviter de recourir à des pouvoirs exceptionnels".

Le "TAPgate" a connu un nouveau rebondissement, mardi soir, après la démission du ministre des Infrastructures Joao Galamba, refusée dans la foulée par le Premier ministre socialiste Antonio Costa, en nette opposition avec le chef de l'Etat conservateur.

"La responsabilité des dirigeants politiques n'a pas été assumée comme elle aurait dû l'être avec la destitution du ministre", a critiqué M. Rebelo de Sousa.

500.000€, l'indemnité qui fait grincer des dents

Après sa large victoire électorale le 30 janvier 2022, qui lui a donné une majorité absolue censée garantir la stabilité de son gouvernement, M. Costa a vu sa popularité dégringoler à coups de scandales à répétition.

Plus d'une dizaine de ministres et de secrétaires d'État ont déjà quitté leurs postes, certains directement liés au "TAPgate".

Ce scandale a éclaté après les révélations sur le versement d'une indemnité de départ de 500.000 euros à une administratrice de TAP. Celle-ci a ensuite pris les commandes de l'entreprise de contrôle aérien et atterri quelques mois plus tard au poste de secrétaire d'État au Trésor.

RTL

© PATRICIA DE MELO MOREIRA / AFP

Crise au gouvernement

La semaine dernière, une nouvelle polémique est encore venue s'ajouter à cette affaire après le limogeage d'un membre du cabinet de M. Galamba, qui a la tutelle de TAP.

Ce conseiller, qui a réagi violemment à l'annonce de son départ justifié par des divergences avec son ministre, emportant notamment un ordinateur portable avec des documents classés secrets, a accusé le ministre d'avoir dissimulé des informations à la commission parlementaire chargée de déterminer les responsabilités dans le "TAPgate".

M. Galamba avait alors alerté les Services des renseignements (SIS) qui ont récupéré l'ordinateur. Il s'est défendu d'avoir caché des informations aux parlementaires et a expliqué avoir présenté sa démission mardi pour préserver "une tranquillité institutionnelle". Le Premier ministre lui a aussitôt renouvelé sa confiance.

Avec cette décision, "le Premier ministre a voulu s'affirmer politiquement", montrant que c'est lui qui décide de "l'avenir politique de ses ministres", a expliqué à l'AFP le politologue Antonio Costa Pinto de l'Institut des sciences sociales (ICS) de l'Université de Lisbonne.

"C'est un nouveau chapitre qui s'ouvre" dans les relations entre le président et le chef de l'exécutif "qui n'est pas positif pour la stabilité", a souligné pour sa part la politologue Paula Espirito Santo.

L'exécutif socialiste a de son côté tenté de minimiser, en rejetant "tout manque de loyauté" à l'égard du chef de l'Etat, a souligné la porte-parole du gouvernement, Mariana Vieira da Silva, à l'issue d'un Conseil des ministres jeudi.

"En cas d'élections anticipées, l'instabilité est due uniquement et exclusivement au Premier ministre", a réagi Hugo Soares, secrétaire général du principal parti d'opposition (PSD, centre droit).