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Redoutée par les frontaliers dont le foyer fiscal comporte des revenus français, la convention franco-luxembourgeoise est bien appliquée dès cette année, a martelé la ministre française des Comptes publics.
La mauvaise nouvelle se précise: certains foyers frontaliers vont devoir se préparer à payer plus d'impôts dès cette année. Interpellée par les sénatrices de Meurthe-et-Moselle, Véronique Guillotin et Silvana Silvani, la ministre française des Comptes publics Amélie de Montchalin a confirmé au Sénat que la nouvelle convention fiscale entre la France et le Luxembourg s'appliquait dès aujourd'hui.
Tout remonte à la convention fiscale franco-luxembourgeoise signée en 2018. Le texte prévoyait un changement de méthode du calcul de l'impôt en France. Une évolution annoncée comme sans incidence pour les contribuables... Sauf que de nombreux frontaliers avaient eu un constat bien différent sur leurs revenus 2020, avec des hausses atteignant plusieurs centaines voire milliers d'euros sur l'année. Ils avaient finalement été sauvés par une tolérance décidée en dernière minute par le ministère de l'Économie. Les frontaliers n'ayant aucun revenu en France n'étant pas concernés
Sur le réseau social LinkedIn, la sénatrice Véronique Guillotin dit ce mardi 8 avril 2025 avoir demandé au gouvernement s'il "comptait engager l’étude d’impact promise par le ministre des Finances de l’époque avant toute application" et "comment il comptait répondre aux inquiétudes persistantes sur nos territoires".
La réponse de la ministre française des Comptes publics a été ferme. "Cette nouvelle convention fiscale a effectivement modifié la manière dont nous comptons traiter et surtout éliminer les risques de double imposition pour les résidents de France qui perçoivent certains revenus de source luxembourgeoise, essentiellement des salaires et des revenus immobiliers. Nous sommes passés d'un régime de l'exemption, qui ne permet pas d'éviter d'éventuelles doubles exonérations, à un régime qui est celui que nous pratiquons depuis les années 90 avec un très grand nombre de pays, y compris voisins: l'Allemagne, la Suisse, l'Italie, l'Espagne, le Royaume-Uni, qui est celui de l'imputation" a d'abord rappelé Amélie de Montchalin, avant de développer.
"Le premier principe est que, les revenus au Luxembourg resteront imposés de manière exclusive au taux prévu par la législation luxembourgeoise. Néanmoins, le passage d'une méthode à l'autre pourra avoir une incidence sur le taux d'imposition appliqué en France aux autres revenus perçus en France. La méthode qui était précédemment utilisée limitait la progressivité de l'impôt appliqué au revenu imposable en France. Sur ce point, je pense que la nouvelle convention va créer de la justice entre nos concitoyens puisqu'elle va s'assurer que les revenus de source française des foyers qui perçoivent par ailleurs des revenus de source luxembourgeoise, soient imposés au même taux que ceux des foyers qui, à montant équivalent, ne disposent que de revenus de source française."
"L'application pleine et entière de la convention permettra de rétablir l'égalité de traitement des frontaliers des autres résidents" a ajouté la ministre française, rappelant au passage que les foyers concernés ont eu le temps d'anticiper cette nouvelle convention. "Pour laisser le temps aux foyers de s'adapter, il y avait eu une tolérance avec la possibilité de maintenir l'application de l'ancien système aux revenus perçus en 2020, 2021 puis 2022 et 2023. Après 4 ans de période de transition, la convention 2018 va s'appliquer pleinement aux revenus perçus à compter de 2024. C'est maintenant que ça s'applique."
Pour terminer son discours, la ministre française a indiqué qu'un "certain nombre de mesures pour accompagner les transfrontaliers" étaient à leur disposition. "Je pense notamment aux guichets spéciaux ouverts au sein de la DDFIP de Moselle (ndlr: Direction départementale des finances publiques) pour aider les contribuables à déterminer l'assiette imposable en France, en application des nouvelles règles conventionnelles. C'est une réforme de justice fiscale entre tous les habitants de la Moselle, de la Meurthe-et-Moselle et des départements environnants. À revenu égal en France, imposition égale !"
De son côté, la sénatrice de Meurthe-et-Moselle Véronique Guillotin a regretté que "l'absence d'étude d'impact n'a pas pu permettre aux travailleurs frontaliers d'anticiper cette mesure." Elle a ajouté que "le fait frontalier doit être appréhendé dans sa globalité" en donnant comme exemple "la mobilité, la santé, l'aménagement du territoire, l'économie, la formation". "On avait évoqué la nécessité d'installer un comité interministériel aux questions frontalières aux côtés des élus locaux..." a t-elle rappelé.
Comme prévu, 2025 risque d'être une année charnière pour de nombreux frontaliers...
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