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Madame, il y a un rhinocéros grandeur nature dans votre jardin ?! – Ben oui, je les collectionne !
Dans un papier récent, l’ouvreuse vous avait fait plein de confidences sur le fait qu’elle était collectionneuse. Ce qu’elle ne vous avait pas révélé, c’est qu’elle collectionne également les rhinocéros. « In every shape or form », comment disent les Anglais. D’autres gens collectionnent des timbres-poste, des porte-clés ou des Mickey, alors pourquoi pas des rhinos. Certes, ces magnifiques mastodontes sont un peu plus encombrants qu’une voiture Dinky Toys ou des figurines en porcelaine Meissner, mais du moment qu’on a assez de place pour les exposer, pourquoi ne pas se faire plaisir ?

Vous vous demandez sans doute d’où vient cette obsession de Marie-Amandine pour les Rhinocerotidae, les Cerathotherium simum ou les Deciseros bicornis ? Vous vous doutez bien que cela doit être en relation avec le cinéma, donc avec un film. Et vous avez gagné le frigidaire en bronze. Chaque cinéphile a un ou plusieurs films qu’il regarde plusieurs fois par an et qu’il amènerait sur une île déserte au cas où la fonte des glaces l’y obligerait. L’ouvreuse en a trois : The General de Buster Keaton et Clyde Bruckman, Singin’ in the Rain de Gene Kelly et Stanley Donen, et Hatari ! de Howard Hawks. Et c’est ce dernier qui a déclenché la passion pour les rhinos. Avec la complicité de John Wayne, Hardy Kruger, Elsa Martinelli, Red Buttons, Michèle Girardon, Bruce Cabot et Gérard Blain, le film – sorti en 1962 chez Paramount Pictures – raconte le quotidien d’un groupe de chasseurs d’animaux sauvages à Arusha, en Tanzanie (Tanganyika à l’époque), qui ne tuent pas les bêtes, mais qui les capturent pour le compte de jardins zoologiques. Grand spécialiste de westerns épiques comme Red River, Rio Bravo, El Dorado ou Rio Lobo, Howard Hawks a utilisé son expérience des grands espaces pour mettre en scène ses baroudeurs et leurs dames dans les paysages magnifiques d’Afrique, et ceci pendant 157 minutes. Aventures, drames, humour et cascades horripilantes, un scénario en béton, une musique signée Henry Mancini et des acteurs qui s’amusent comme des gosses durant un tournage épique sur lequel l’ouvreuse (âgée de 9 ans en 1962) aurait voulu être une souris…ou une girafe.

Hatari ! est sans doute le film que l’ouvreuse a visionné le plus souvent dans sa vie. Elle le possède en laserdisc, en DVD normal et en BluRay, elle l’a vu plusieurs fois au cinéma, elle l’a revu à la Cinémathèque et des dizaines de fois chez elle, dans son cinéma privé. Plusieurs affiches du film sont accrochées dans sa chambre à coucher, un jeu complet de lobby-cards (photos affichées au ciné) fait également partie de sa collection et…une vingtaine de rhinos en verre, en porcelaine, en métal, en flip-flops recyclés, en étoffe ou sur peinture sont éparpillés un peu partout dans sa bicoque. Plus l’énorme monstre dans le jardin devant la maison, où les chats du voisinage lui rendent régulièrement visite, et où les gosses des voisins aiment bien se faire prendre en photo alors qu’ils chevauchent la bête. Plus on des fous…

Vous vous imaginez bien que Marie-Amandine a également fait un pèlerinage à Arusha, en Tanzanie, sur les lieux mêmes du tournage. Et c’est là qu’un guide touristique canadien, ami de l’ouvreuse, lui ai a fait le plus beau cadeau qu’on puisse imaginer pour un dingue de rhinos. Dans une réserve naturelle, où deux rhinocéros sont gardés jour et nuit par des rangers armés jusqu’aux dents, votre servante a pu – sous très haute surveillance – s’approcher de près et même caresser un des deux colosses qui, soit dit en passant, s’appelait Kofi Annan. En fait, un rhino que l’on n’embête pas, c’est comme une vache broutant paisiblement l’herbe toute la journée. Et au toucher, c’est comme une énorme valise en cuir et à quatre pattes. Nul besoin de préciser que ce moment magique, qui a eu loin des yeux indiscrets des autres touristes du groupe, restera à toujours gravé sur les rétines de votre mère l’ouvreuse. Il existe bien évidemment des photos de l’expérience, mais comme elles révéleraient l’identité de Marie-Amandine, elles restent sous scellés. Clin d’œil complice…

Mais ce n’est pas tout. L’ouvreuse se promène régulièrement sur des sites internet où l’on propose affiches, photos, autographes et autres souvenirs de cinéma. Figurez-vous qu’un jour, un de ces sites a mis aux enchères plusieurs planches de contact de photos prises par le photographe de plateau de « Hatari ! ». Ces planches montrent les acteurs et le réalisateur pendant leur travail, elles sont évidemment très rares. Marie-Amandine n’a pas pu se retenir et elle a participé aux enchères. Après une nuit d’angoisse, elle a réussi son coup…pour 480 dollars. Reproduire ces photos dans une qualité acceptable n’est certes pas facile, mais c’est possible. Vous en avez la primeur à la fin de cet article. Même si c’est un peu flou, c’est un souvenir d’un film épique, fabriqué à une époque, où Hollywood savait encore comment distiller le plaisir de ses spectateurs. Révélation ultime : « Hatari ! » signifie « Danger ! » en Swahili.
Marie-Amandine
Obsédée