Oui, l’ouvreuse a vu "Once upon a Time in Hollywood" avant vous, c’est un des rares privilèges de son métier éreintant de vendeuse de popcorn. Son opinion sur le film ? Plus cinéphile, tu meurs !

Lorsque la nouvelle est tombée, il y a quelques années, que Quentin Tarantino allait tourner son neuvième film et qu’il s’intéresserait de près à l’assassinat sauvagement crapuleux, en 1969, de Sharon Tate, l’épouse enceinte de Roman Polanski, et de ses amis, par des disciples de Charles Manson, Marie-Amandine a ravalé sa salive. Connaissant le goût de QT pour la violence excessive, elle s’est dit qu’il ne pouvait y avoir pire réalisateur que le grand dadais américain pour traiter ce sujet délicat et douloureux… et que le film serait d’un mauvais goût désastreux. Eh ben, l’ouvreuse a eu tort. Car si l’ombre de cette innommable tragédie flotte au-dessus des 165 minutes que dure "Once upon a Time in Hollywood", la façon dont Tarantino l’a approchée ne pouvait être plus décente, plus tendre même. Oui, vous avez bien lu, tendre. L’ouvreuse ne va certainement pas gâcher votre surprise en révélant comment il a réussi à ne pas se faire écraser par le gros éléphant dans la chambre (du dicton anglais : The elephant in the room), mais elle n’aurait jamais cru QT capable d’autant de doigté, voire de tact. Son approche et sa solution frôlent le génie, vraiment.

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© Sony Pictures

Ce qui ne veut pas dire que Tarantino ait laissé de côté la violence si typique à sa filmographie, bien au contraire.  Ça canarde, ça se tape dessus, ça se balance des coups de poings dans la tronche, ça casse des os, ça incinère même des Nazis (entre autres) à coups de lance-flammes et ça se fout royalement de la tronche de Bruce Lee, ce qui n’a d’ailleurs pas été apprécié par la fille de celui-ci, qui accuse Tarantino d’avoir sali la mémoire de son papa. "Once upon a Time in Hollywood" est certainement le film le plus nostalgique de QT sur le cinéma et sur les années 1960 à Los Angeles. Son film le plus iconoclaste, aussi, puisque le cinéaste le plus cinéphile au monde (avec Martin Scorsese) se permet ici un trip nostalgique "down memory road" qui pourrait même prendre des airs de testament cinématographique, Tarantino ayant proclamé récemment qu’il pensait abandonner la réalisation. Chiche !

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L’argument du film : Dans les années 1950, Rick Dalton (Leonardo di Caprio) était la vedette d’une série télévisée western très populaire. Maintenant, en 1969, alors que le cinéma américain est en pleine mutation, l’acteur vieillissant craint le déclin inexorable de sa carrière. Il considère même s’exiler en Italie pour tourner des western spaghetti avec Sergio Corbucci ou Calvin Jackson Paget. Faute de travail, son cascadeur et ami de longue date, Cliff Booth (Brad Pitt), est confiné au rôle de chauffeur et d’homme à tout faire. Il s’occupe, entre autres, de la propriété de Rick Dalton sur Cielo Drive, une rue privée d’un quartier situé à l’ouest de Los Angeles. En même temps, dans une maison voisine, une jeune actrice emménage avec son mari, un réalisateur polonais de renom…

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Dire que les huit films précédents de Tarantino étaient bourrés de références au cinéma (surtout populaire) serait un pléonasme, mais en racontant une histoire qui joue au sein même de Hollywood, au milieu de la faune locale d’acteurs, de réalisateurs, de cascadeurs et de producteurs foireux, QT a trouvé sa mine d’or. Le producteur fictif Marvin Schwarz est d’ailleurs campé à merveille par un Al Pacino en roue libre, il avait remplacé Burt Reynolds au pied levé quand celui-ci est mort. Attendez-vous donc au film le plus ambitieux de Tarantino à ce jour, celui où il se fait plaisir pendant près de trois heures et où il passe en revue tout ce qui l’a toujours fasciné dans le cinéma, y compris le cinéma de quartier. QT prend son temps, il aime filmer in extenso les longues balades en bagnole, surtout les bagnoles qui passent devant les cinémas où on voit les affiches de tous les films populaires de 1969. Il aime toujours autant les longues conversations, mais ici, elles ne sont pas aussi assommantes que dans son "The Hateful Eight". Si vous n’êtes pas cinéphile dans l’âme comme l’ouvreuse, si vous ne comprenez rien à toutes les références plus ou moins subtiles qu’il place à tort et à travers, vous risquez de ne pas apprécier ce film-fleuve bourré de trouvailles, mis en scène et photographié de main de maître, mais qui est tout simplement trop long pour le spectateur-lambda qui n’en a rien à foutre de la cinéphilie galopante du cinéaste. Ah oui, QT s’étant fâché avec Ennio Morricone sur "The Hateful Eight", le maestro italien brille par son absence sur la trame sonore de "Once upon a Time in Hollywood". Ce qui a valu une sacrée surprise à l’ouvreuse, puisqu’un morceau du très improbable Maurice Jarre fait son apparition lors de la plus belle séquence du film.

Marie-Amandine
Cinéphile comme QT