L'ère Mellina s'achève sur un beau bilan financier pour Pétange et le rêve d'un futur construit sur le tourisme. Mais la cinquième commune du pays est aussi confrontée a bien d'autres défis.

Comme en plein cœur de Differdange ou encore à Esch-sur-Alzette, l'industrie sidérurgique subsiste à Pétange avec 200 emplois. Mais comme Pierre Mellina, bourgmestre CSV de Pétange depuis dix-huit ans peut en témoigner, la commune s'est complètement transformée au cours des quarante années passées.

"Aujourd'hui les gens ne viennent plus ici pour travailler, mais pour vivre. Ils travaillent à Luxembourg, Esch ou ailleurs", résume-t-il. Révélant dans la même phrase le double challenge que doit relever la "Cité ferroviaire" dans les années à venir: offrir à ses habitants "une bonne qualité de vie avec tous les services, scolaires, sportifs et culturels". Et "créer de l'activité et de nouveaux emplois".

Challenge que la majorité CSV-LSAP n'a pas vraiment su relever au cours de la législature, aux yeux des Pirates, leurs opposants (2 sièges) au conseil communal. "Trop longtemps", le monde des affaires "a été oublié" et "beaucoup d'entreprises sont parties" car les élus du CSV et du LSAP "préfèrent depuis des années un taux élevé de l'impôt communal", critiquent les Pirates. Leur projet électoral pour les élections communales de ce dimanche 11 juin est de rendre "la commune à nouveau fiscalement intéressante".

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Les Verts comptent y parvenir en soutenant "l’implantation de petites et moyennes entreprises dans les zones d’activités". Mais pas n'importe lesquelles. Leur préférence ira aux entreprises qui "misent sur la durabilité et l’adaptation."

De la place, Pétange, qui s'allonge le long de la verte Chiers qu'elle partage avec la France et la Belgique, n'en manque pas. Sur les friches industrielles du Grand Bis, dort une zone de 16 hectares dans laquelle "on peut encore développer du commerce, de l'industrie ou de l'économie" à Rodange, sourit Pierre Mellina. Ce que le LSAP soutient évidemment. Le parti socialiste propose de "créer de nouvelles zones d’activités" et porte avec le CSV le projet d'implantation du futur centre de remisage des CFL "pour créer davantage d’emplois". Ce centre abritera une partie des 36 futurs trains régionaux Coradia de 160 mètres de long.

La vaste zone économique qui jouxte la frontière et qui est gérée par le Syndicat intercommunal Kordall (SIKOR), va être aménagée "pour 30 millions d'euros par la commune", lâche-t-il. Son Premier échevin et successeur "naturel" au CSV, Jean-Marie Halsdorf, rajoute que le "Point triple", vers lequel convergent Luxembourg, France et Belgique est "unique en Europe" et "c'est une dimension que nous voulons développer dans les années à venir".

Car l'autre idée portée par le tandem CSV-LSAP est de redonner un souffle nouveau à Pétange en y développant le tourisme. Pétange, contrairement à Dudelange par exemple, ne peut plus vraiment s'étaler. La commune aux près de 21.000 habitants n'est pas géante (12 km2) et très limitée dans son extension car posée dans un vaste écrin naturel protégé. 52% du territoire ne sont pas constructibles car classés en zone Natura 2000. Une nature que la majorité politique voit comme un atout touristique.

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Mais cette vision du développement de la commune n'est pas partagée par tous. Le meilleur exemple est le projet d'hôtel wellness JUFA - du nom d'une chaîne hôtelière autrichienne - qui doit être réalisé en pleine nature à Rodange, non loin de la piscine Piko et à 15 minutes à pied du Fonds de Gras. Mais son implantation a été vivement contestée par deux initiatives citoyennes, les Biergerinitiav Doihl et Kordall. Pierre Mellina rétorque que les décisions on toujours été unanimes au sein du conseil communale et qu'à présent "l'autorisation est définitive".

Une autre carte à jouer est celle du riche passé historique de Pétange, porte de sortie et d'entrée du Luxembourg, qui a vu passer la Grande-Duchesse pour s'exiler et les libérateurs américains à la fin de la Seconde guerre mondiale. Pétange a été la première commune libérée du Luxembourg. Autre atout touristique, le passé ferroviaire de la cité. Avec son fleuron, le train 1900 qui circule de Pétange au Fonds de Gras. "On veut aussi créer un musée national ferroviaire avec les Sites et Monument et l'Institut national pour la protection architecturale Luxembourg (INPA). La commune a acheté le terrain", révèle le bourgmestre. Mais Déi Gréng sont opposés à ce "projet douteux" car il est prévu en bordure de la zone Natura 2000 "Prënzebierg - Giele Botter".

Pétange va aussi se lancer dans une aventure aux vertus touristiques: "Créer un musée du son pour montrer le développement de la radio sur cent ans", lâche Pierre Mellina. Un ancien bâtiment fermier à Lamadelaine accueillera le projet.

Mobilité et trafic frontalier

"Pétange est la seule ville qui a un accès ferroviaire direct avec Luxembourg-Ville en 20 minutes. C'est un argument de poids" pour la qualité de vie aujourd'hui, glisse Jean-Marie Halsdorf.

Bien moins réjouissant reste le gros problème du trafic de transit. L'avenue de l'Europe, le contournement de Pétange, "ne fonctionne pas normalement", reconnaît volontiers Pierre Mellina. Un des problèmes récurrents qui restera sur les bras de la future majorité, c'est le trafic quotidien qui passe par le rond-point Porte de Lamadelaine. Une des solutions serait de faire passer le trafic de transit frontalier en-dessous du rond-point. D'autres partis envisagent de le faire passer au-dessus du rond-point.

Le LSAP estime que pour réduire les nuisances du trafic de transit, "une mise à quatre voies de la rocade " Boulevard de l’Europe" s’impose plus que jamais" et qu'il faut coupler cette solution "à un tunnel ou un pont au Rond-Point Lamadelaine".

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Pour les Pirates, "le trafic de transit doit disparaître de nos villages et trouver son chemin via la collectrice". Ils promettent qu'ils "réaliseront enfin le construction du tunnel de la collectrice" près du lycée Mathias Adam.

Déi Gréng veulent aussi "réduire le trafic de transit" pour "améliorer la qualité de l’air et créer plus d’espace pour les piétons, les vélos, les terrasses et les espaces verts". Ils proposent d'élaborer "un plan de mobilité mettant l’accent sur le passage aux transports en commun et aux modes de transport doux". Ils veulent aussi mettre en place à Pétange le système Vël’OK permettant de louer des vélos électriques pour des trajets courts. Un système qui relie déjà toutes les communes du sud... sauf Pétange.

Le LSAP va même un coup de pédale plus loin en proposant de mettre en place un "système de vélos électriques uniforme, utilisable également dans les communes voisines belges, françaises et luxembourgeoises".

La sécurité en ville

Pétange est régulièrement confrontée à l'insécurité et "le trafic de drogue est en plein essor dans la commune", pose l'ADR. Un thème dont plusieurs partis se sont saisis pour mener campagne. Le CSV compte renforcer les effectifs des agents communaux et promet une présence régulière des policiers sur le terrain.

Le DP s'engage, au niveau national, pour "la réintroduction d'une police municipale" et préfère agir dans le domaine de la sécurité en embauchant davantage de streetworkers. L'ADR rappelle que Pétange compte "un commissariat pour plus de 20.000 habitants" et plaide pour "plus de patrouilles de police avec des chiens de drogue".

Pour les Pirates, il n'y a pas besoin d'une police municipale mais "enfin besoin d'un véritable bureau de police occupé 24 heures sur 24" et de "plus d'agents".

Déi Gréng veulent "renforcer la police sur le terrain et misent sur l’élargissement des compétences des agents municipaux". Ils militent pour la construction d'un commissariat à Pétange, alors que le CSV ne parle que d'agrandissement. Le LSAP propose de construire un nouveau commissariat, mais aussi un "poste de police commun aux 3 pays limitrophes au carrefour des trois frontières ou à l’avenue de l’Europe".

Déi Gréng sont pour l'utilisation de "la vidéosurveillance de manière ciblée" et "dans les lieux sensibles". Une utilisation contrôlée que prône aussi le LSAP.

Déi Konservativ réclament un "plan policier et des statistiques sur la criminalité", mais aussi "des commissariats de proximité ouverts 24 heures sur 24" et la "création de nouveaux bureaux de police".

Le tandem CSV-LSAP reconduit?

"En 2004, nous étions à 38 millions d'euros d'endettement et pas de réserve. Aujourd'hui on a 2 millions d'euros d'endettement et 16 millions de réserve", pose Pierre Mellina avec une fierté non dissimulée. Le bourgmestre (CSV), peut délaisser son siège la tête haute. Après dix-huit années passées à la tête de la commune le grand bonhomme moustachu aux yeux rieurs laisse une commune avec des finances communales comme beaucoup de ses pairs en rêvent au Luxembourg.

Même si le CSV avait avait maintenu ses 8 sièges en 2017, il reste à voir si le parti qui tient les rênes de Pétange depuis dix-huit ans en tandem avec le LSAP (4 sièges) sera reconduit cette fois. Jean-Marie Halsdorf, ancien ministre de l'Intérieur et de la Défense et Premier échevin sortant qui emmène la liste du CSV aux côtés de André Martins Dias, pèse-t-il électoralement aussi lourd que son compère Mellina le bon gestionnaire? Il pourra compter sur les voix du bourgmestre sortant qui reste au conseil, mais plus sur celles de Roland Breyer, conseiller communal durant 49 ans, qui ne rempile plus.

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Le LSAP emmené par l'échevin Romain Mertzig va tenter de reconquérir au moins le siège perdu aux élections de 2017. Mais les LSAP et CSV le savent. En ayant passé la barre des 20.000 habitants en 2020, ce ne sont plus 17, mais 19 conseillers qui sont à élire. Toutes les cartes sont redistribuées! Mais à qui des six partis restants?

La surprise viendra-t-elle une nouvelle fois des Pirates du député Marc Goergen et de Teresa Monteiro? Les Pirates avaient "débarqué" au conseil en raflant deux sièges pour leur première participation en 2017. Ou la surprise viendra-t-elle de Déi Gréng qui veulent "construire l'avenir". Ils sont portés par quatre têtes de liste que sont Romain Becker, Michèle Machado, Romain Scheuer et Kim Scheiden, et par l'urgence climatique.

Dans la course également, le DP est emmené par deux têtes de liste: Barbara Agostino et Molly Berens,  
Déi Lénk emmenés par Sonia Neves et Ben Muller. Mais aussi l'ADR représenté par Jean-Marie Kalmus et Arlette Kieffer. Et le président de Déi Konservativ, Joe Thein, qui va tenter une percée dans son fief.

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